21 mars 2014 5 21 /03 /mars /2014 17:03
Généraux, pourquoi on va boycotter votre comédie du 17 avril.

Saïd RADJEF

« Cette grande reforme, comme vous pouvez le voir, peut être réalisée sans verser une goutte de sang, sans violence, sans enfreindre la loi humaine ou divine. Si un homme abuse de son autorité, si un homme prend par la force une ferme d’où un pauvre est expulsé, je vous conjure de ne lui faire aucun mal physique. Agissez envers lui comme la Reine d’Angleterre le ferait envers vous. Elle ne vous considérerait pas comme ses égaux, ni vous, ni votre femme, ni vos enfants. A présent, imitez la Reine d’Angleterre et ne parlez ni à un propriétaire terrien qui abuse de son autorité, ni à sa femme, ni à ses enfants. S’il vient en ville et veut vendre quelque chose, ne le violentez pas, ne lui faites aucun mal physique. Si vous le voyez entrer dans un magasin pour acheter du pain, ou des vêtements, ou même du whisky, allez voir immédiatement le commerçant pour qu’il se rétracte…Dites seulement au propriétaire terrien qui abuse de son pouvoir que d’après la loi britannique, il a le droit incontestable d’acheter ou de vendre ses marchandises à n’importe qui, mais qu’il n’existe aucune loi en Grande Bretagne qui vous oblige à lui vendre ou à lui acheter quoi que ce soit, et que vous ne le ferez jamais aussi longtemps que vous vivrez. »
Voila ce qu’écrivait un journaliste américain, pour relater l’action menée à l’encontre des propriétaires irlandais en 1880. Comme le premier individu mis ainsi à l’index s’appelait Charles Cunningham Boycott, le maire Redpath et un prêtre, le père John O’Malley, eurent l’idée d’appeler boycott toute action visant à mettre en quarantaine tous les propriétaires terriens qui abusaient de leur autorité et de leur pouvoir.
C’est quoi une élection dans un régime autoritaire ? Une élection dans un régime autoritaire est un grand marché ou le régime occupe par la force, la violence, la corruption et la ruse d’immenses stands pour exposer sa marchandise et vendre ses produits.
Le régime autoritaire et le pouvoir personnel se construisent sur la condamnation de la démocratie et de ses valeurs de pluralisme, d’alternance et de tolérance. Ainsi, les libertés individuelles, l’Histoire, l’imaginaire collectif et la libre pensée disparaissent au profit du pouvoir personnel, du culte de la personnalité, de la propagande, du mensonge, de la schizophrénie collective et des chimères politiques. C’est une expropriation morale et intellectuelle de la nation algérienne !
L’État autoritaire est omniprésent dans la société que l’on cherche à soumettre. Bouteflika et l’armée sont tout. La république, la citoyenneté et l’Algérien ne sont rien.

Depuis 1954 à ce jour, l’Algérie s’incarne dans un modèle, le chef charismatique, otage des caporaux, et probablement l’outil qui va légitimer un autre coup d’Etat après le scrutin du 17 avril prochain. Issus du peuple, contrairement à d’autres régimes, Bouteflika et les généraux sont des guides, des protecteurs, des moudjahidines prêts à mourir pour la patrie contre la menace terroriste qu’ils ont eux-mêmes fabriquée, des initiateurs de la grandeur retrouvée, les artisans de la paix et des grandes réalisations, des incontestés et infaillibles des combats pour la libération des peuples…Flattant, galvanisant les foules, le chef charismatique entretient cette adhésion populaire, cette ovation qui fait fondre le froid des Aurès et du Djurdjura en communion entre le tyran et la victime.
Bouteflika est l’instrument avec lequel le régime compte se régénérer. Mais quel beau rôle pour les généraux lorsqu’ils auront destitué un homme usé par la maladie et dévoré par le pouvoir personnel ! Une fois de plus, nos caporaux à la noix de coco vont se présenter lorsqu’ils auront fini d’instrumentaliser la carcasse et les restes d’un président otage, comme les sauveurs de la république et de la démocratie !
Certains parmi nos amis au sein de la gauche et du FFS, ainsi que nos camarades au sein de la mouvance islamiste qui appellent de tous leurs vœux à une participation massive, doivent comprendre que le scrutin du 17 avril prochain est une étape d’un complot dont la finalité n’est rien d’autre qu’un coup d’Etat qui va fournir l’occasion aux décideurs au sein de l’armée de se prévaloir d’une certaine légitimité. Il n’y a aucun bien dans ce régime. Il ne porte en lui aucun instrument qui puisse permettre à la classe politique de mettre du mouvement dans le statu quo, de construire une démocratie et de rétablir l’ordre moral, citoyen et politique sur son trône naturel. Tout est ruse, tout est trahison en lui. Ses gènes sont faits du mal.
Comment peut-on participer à ce scrutin lorsque le principal candidat, otage d’une poignée de généraux, est cliniquement mort depuis bien des mois ? Il ne s’agit pas de boycotter Bouteflika, le scrutin du 17 avril, mais il s’agit de déjouer un complot par lequel les militaires comptent confisquer le pouvoir politique qu’ils détiennent sans partage depuis 1954. Il s’agit de libérer Bouteflika et d’empêcher le régime de l’utiliser comme un instrument pour un autre coup d’Etat après l’élection présidentielle.
C’est là toute la marchandise que compte nous vendre le régime pour assurer sa survie. Mais si nous refusons d’acheter sa marchandise, il va faire faillite et baisser rideau…Bouteflika n’existe plus. C’est un produit avarié. Les décideurs veulent le mettre sur le marché pour le retirer ensuite pour donner l’impression au peuple que les dirigeants sont au service de la démocratie et contre la contamination des principes fondateurs de la république…

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