17 août 2014 7 17 /08 /août /2014 11:30
Messieurs les dirigeants, demandez pardon au peuple avant que cela ne soit trop tard !

Par Radjef Said

Comme les fois précédentes, l’élection présidentielle d’avril 2014 a vu s’affronter deux clans opposants et rivaux qui non seulement appartiennent à la même famille politique, mais constituent les deux piliers fondamentaux du régime despotique algérien. Deux clans rivaux de longue date unis par le mensonge et la violence, mais qui ne se font pas de cadeaux lorsqu’il s’agit pour l’un d’eux de conquérir la totalité du pouvoir. Deux clans portés par la même philosophie d’existence et qui partagent la même responsabilité dans la faillite politique du pays. Pour cette raison d’une importance stratégique, il était inévitable que ce concours électoral décide de l’avenir à long terme du pays. Toutes les personnes concernées devraient avoir réfléchi très sérieusement à cette question critique: sans le devoir de mémoire et sans le devoir de vérité, les élections (quelles que soient leur importance) pourraient-elles créer les conditions capables de permettre d’établir la base du meilleur avenir possible pour les algériennes et les algériens?

Cependant, la réalité objective est que l’élection présidentielle de 2014 comme du reste toutes les autres élections précédentes, n’auraient pas dû avoir lieu au moment où elles ont été organisées. Il était parfaitement prévisible qu’elles ne feraient que renforcer le conflit auquel elles étaient censées mettre fin : la guerre des clans qui retient en otage la république, depuis plus d’un demi siècle.

Au vu des tiraillements et de la guerre que se livre la presse par medias interposés, en dépit d’un semblant de stabilité tant sociale, politique que sécuritaire, on a le sentiment qu’on est au bord du précipice, de l’explosion, que rien n’est plus sur, que le pays navigue à vue et qu’il est divisé en deux Etats, l’un officiel mais sans la moindre souveraineté, l’autre clandestin qui concentre entre ses mains presque la totalité des pouvoirs.

Aucune élection ne peut venir à bout de la crise algérienne. A la vérité, il n’y a pas plusieurs solutions à cette crise. Sa thérapie nécessite le recours au devoir de vérité, à un travail de mémoire, qui passe par un travail de deuil, afin de pouvoir renoncer à l’objet perdu et de pouvoir tendre vers une mémoire apaisée, et vers une réconciliation avec le passé. Il y a mensonges, abus et violences inouïes contre le peuple algérien de la part du régime en place. Les similitudes entre Melouza et Bentalha sont plus que saisissantes. Les dirigeants algériens, notamment ceux de l’armée qui détiennent la réalité du pouvoir depuis le 1er novembre 1954 à ce jour, doivent demander pardon au peuple. La réconciliation c’est le rétablissement des liens du vivre ensemble qui ont été rompus par une succession de violences morales et politiques. Cette rupture que l’on pourrait également appeler crise de confiance entre le citoyen et l’autorité, est maintenue par la haine, la haine de soi, le ressentiment, voire une souffrance enfouie qui n’arrive pas à s’extérioriser. Quelles sont les actions qui permettent de guérir les blessures, de réparer les pertes et de reconstituer sur son propre fonds les formes brisées ? La mémoire est une sorte de fichier mental qui sert pour l’avenir : comment faire pour que celui-ci fonctionne comme un remède et non comme un poison qui mûrit au fil du temps ? Quand les possibilités du vivre ensemble sont détruites, le territoire commun (ou les valeurs qui unissent le peuple algérien sont plus fortes que celles qui les divisent) le territoire commun devient inhabitable.

Cependant, au lieu de s’inspirer des expériences des autres pays comme l’Afrique du Sud, l’ex RDA, la Pologne,le Chili, l’Argentine, le Rwanda…ou la sagesse politique alternée entre devoir de vérité et amnistie a permis aux peuples de ces pays de retrouver la paix, le régime algérien mise par une série de mesures (la corruption, la clochardisation de la société et la destruction des lieux de socialisation) sur l’oubli, pour assurer l’impunité aux criminels. A cela s’ajoute la manipulation de la mémoire, rendue possible grâce aux crimes et aux méfaits commis par la colonisation durant plus d’un siècle d’occupation contre le peuple algérien. Celle ci a souvent tendance à user des stratégies de victimisation, dans la mesure où revendiquer la position de victime place le reste du monde en position de redevable, et de là, la victime apparaît légitime de gouverner à vie, de se plaindre, de protester, de réclamer.

Sans le devoir de vérité et sans pardon, avec tous les modes de scrutins possibles, on ne fait que reporter la tragédie algérienne à une date ultérieure.

19 avril 2014 6 19 /04 /avril /2014 07:04
Les leçons d’un scrutin.

Saïd RADJEF

Et maintenant que le résultat du scrutin du 17 avril est officiellement proclamé, quelle lecture feront les uns et les autres? N’est-il pas temps de regarder les choses en face, de se rendre à l’évidence? Quelles sont les leçons de ce scrutin? D’abord, Ali Benflis n’est pas l’homme providentiel qu’attend le peuple, l’homme qui peut faire trembler un régime sans scrupules ou les requins se protègent entre eux. Le scrutin du 17 avril qui a consacré, comme attendu, la victoire d’un homme cliniquement mort depuis des mois, n’a pas seulement dévoilé au grand jour les complicités, les liens si forts qu’entretiennent entre eux les différents clans du régime, pour ne pas perdre le pouvoir qu’ils détiennent depuis plus de soixante ans. Il aura surtout montré la faillite et les limites politiques de l’opposition qui, tel un enfant imbécile, a cru naïvement aux jeux d’illusions orchestrés la veille par l’armée, pour faire croire à des dissidences au sein du régime. Les généraux, malgré leurs insuffisances intellectuelles et politiques, ont su sur quel terrain et à quel moment mener la bataille pour assurer la survie du régime, pour plusieurs décennies encore. Ils ont su quelle stratégie adoptée face à une societé tétanisée par la peur des violences et si faible devant les friandises du gain facile et de la corruption. Comment donc un pays qui compte plus de 80% de jeunes de moins de trente ans peut-il se reconnaitre, s’identifier dans un régime usé par le temps et disqualifier par l’histoire et tourner le dos à l’opposition, aux partisans du changement? Parce que le scrutin du 17 avril a également montré l’incapacité de l’opposition a mobiliser un pays généralement hostile au régime militaro- rentier. Après plus d’un demi siècle d’indépendance, l’opposition peine encore a se trouver un discours capable de mobiliser et de rassembler, face à l’un des régimes les honnis de notre époque.
Que donc l’opposition cherche d’abord a changer les éléments qui la bloquent et la paralysent devant le régime, avant de songer, comme Don Quichotte, à s’engager dans des terrains inconnus, pour changer l’ordre des choses, c’est à dire la dictature des caporaux!

14 avril 2014 1 14 /04 /avril /2014 17:22
L’armée, Benflis et les autres

Par Saïd Radjef!
Comment ne pas donner raison au général de Gaulle lorsqu’il a déclaré à propos de l’indépendance algérienne : « ne vous en faites pas, ce qu’on leur a donné de la main droite, on le reprendra d’ici peu de la main gauche. »
Un pays qui n’arrive pas à organiser une élection, des élites débiles à en mourir de rire, des militaires présents même dans notre soupe à moins de deux sous, des candidats girouettes…
Rien qu’à entendre certaines déclarations et lire quelques titres, on a envie de cracher dans la soupe et de changer complètement de cap.
Passons le cas Bouteflika, un homme usé par de nombreuses maladies et cliniquement mort depuis des mois, qui aspire à un quatrième mandat et prenons celui de Ali Benflis qui suscite l’enthousiasme et les ardeurs de nos élites bien pensantes : voici donc un homme inconnu de la majorité du peuple, un homme qui n’a jamais agi en dehors de la volonté du régime, qui s’éclipse dans une longue hibernation dans les moments difficiles lorsque le peuple a besoin de soutien, qui n’a pas de parti politique et de base d’électeurs, un homme dont tout le parcours se résume à un petit cv de fils de chahid, mais qui menace de faire replonger le pays dans chaos et la tragédie au cas ou il n’accéderait pas aux plus hautes destinées du pays, au lendemain du 17 avril . Voilà qui est bien intriguant, qui choque l’esprit rationnel ! D’où il tient la certitude d’être élu dés le premier tour le 17 avril ? De quelle force, de quelle arme secrète dispose t-il pour se permettre de telles menaces, pour se permettre cet odieux chantage contre la république ? Comment donc un rejeton du régime qui n’a aucun programme, aucun passé politique hormis une alliance contre nature avec les Aarouchs conçus par les généraux M Lamari, K Nezzar et F Cherif , peut-il s’exalter ainsi et traîner derrière lui autant d’universitaires ? Que penser de ces leaders et autres universitaires es qualité qui soutiennent une telle démarche ? Sont-ils complices du mensonge et de la manipulation, ce qui est grave, ou bien très limités intellectuellement, ils ne se rendent pas compte de leur forfaiture morale ? A défaut d’un programme qui se démarque de la double légitimité révolutionnaire et historique qui a privé la nation d’avoir un État, le chantage. Et pourtant Ali Benflis est seul. Comment donc un homme seul peut-il mettre en péril l’avenir d’un pays, d’un peuple ? Telle est la nouvelle religion que Benflis propose à ses compatriotes, à l’occasion de ce scrutin du 17 avril.
A la lecture de ces propos d’où glissent en filigrane les formes les plus odieuses du chantage, on saisit que Benflis dépourvu de vision et de stratégie politiques, n’est pas, comme il le prétend, un candidat indépendant ; il est le candidat d’un clan de l’armée, d’un clan de caporaux qui à de la peine à comprendre que les époques, les comportements et les mentalités ont changé, qu’avec de telles manipulations le pays ne pourra jamais se hisser au rang de nation, qu’il sera toujours une dynastie privée destinée à être recolonisée…
Tout récemment, un membre de la pègre financière kabyle nous a affirmé que le soutien (se chiffrant à des milliards de centimes) qu’il a apporté au candidat A Belaid lui aurait été dicté par les généraux. Ces derniers l’auraient assuré de l’appartenance de ce candidat aux plus hautes sphères de la police politique algérienne.
A la lumière de ce qui précède, que peut-on penser de notre armée qui continue a polluer l’espace politique et a instrumentaliser la crédulité immense du peuple ? Peut-on dire d’une armée qui persiste dans la clandestinité et la manipulation politique qu’elle est forte, qu’elle est sur le point de restituer la décision politique à qui de droit ?
Nous sommes certains qu’avec leur cupidité légendaire nos caporaux se disent aujourd’hui « après toutes les forfaitures dont on a été les maîtres d’œuvre depuis 1954 à ce jour, personne ne nous a inquiété. Alors pourquoi pas encore aujourd’hui alors qu’en face de nous c’est le vide sidéral, il n’y a aucune résistance politique pour permettre au peuple de se réapproprier son destin ! »
Mais faites gaffe messieurs les caporaux, cette fois ci les enjeux dépassent votre ruse paysanne !

12 avril 2014 6 12 /04 /avril /2014 17:47
He ! Psst ! Le Borgne, Erbah ya w’lidi, erbah.

Said RADJEF

He ! Pst ! Le Borgne, R’bah ya w lidi, r’bah.
La conversation qui n’est pas un câble de Wikileaks.

-Approchez, je vais vous donner une information de taille. Vous êtes l’Emir de la région, n’est ce pas ? Vous êtes le borgne ?
-Oui, et alors ?
- Je constate que vos rangs ont beaucoup grossi au cours de ces derniers jours. Il y a beaucoup de recrues à ce que je constate…Est-ce que vous avez faim ? Vous avez pleinement profité de la réconciliation et de la concorde pour vous refaire une nouvelle santé.
-Non, merci. L’armée nous traite bien. On partage tout avec les soldats de l’ANP. On a suffisamment de treillis, de lait, de viande, de fromage et de corned-beef.
-Donc vous n’êtes plus des terroristes, vous n’appartenez plus à l’AQMI ? Vous n’allez plus faire de faux barrage et d’incursions en Kabylie ?
-Pour l’instant…Dites, vous ne devez pas me donner une information ?
-Je me suis dit comme votre tête est mise à prix par l’ONU, il est bon de savoir qu’il y a plein d’étrangers qui vont débarquer ces jours ci à Tizi ouzou. Ce ne sont pas de simples touristes ; ce sont des personnalités importantes qui peuvent vous rapporter de gros sous, plus que le site gazier de Tigguentourine.
-Et alors ?
- Au lieu d’enlever de simples commerçants à Mâatkas, vous allez pouvoir vous payer la tête de l’ONU et exiger de vraies rançons, d’autant plus, contrairement au Sahel ou tout est à découvert, les otages sont faciles à cacher dans les maquis accidentés du Djurdjura . Vous allez même bousiller le scrutin du 17 avril. Vous serez ainsi à la une de tous les medias du monde, pendant plusieurs semaines.
-On ne peut pas agir ainsi. Les instructions de Si Ali et de Si El Bombardi sont fermes : pas d’attentats contre les étrangers durant cette compagne électorale. Par ailleurs, pour ne rien vous cacher, on vient de passer un accord, une sorte de compromis avec les autorités algériennes représentées par Ramtane Lamamra. Nous sommes une armée du compromis.
-Donc, vous déposez les armes ?
-Non ! On soutient le scrutin du 17 avril.
-Je ne comprends plus rien, je perds les pédales ! Comment pouvez vous soutenir une élection ou il n’y a pas de candidats, ou vous n’avez pas de candidat ?
-Nous allons voter avec force et massivement.
-Quel est votre candidat ?
-Notre candidat, c’est le régime.
-Mais le régime c’est vague…
-Tout le monde bosse pour le régime. Dites moi, vous qui êtes si intelligent, ou est la ligne de démarcation entre Bouteflika, Benflis, Hanoun, A Belaid, Rabaine et Touati ? Le régime, c’est la mitraillette, et tout ce beau monde se bouscule pour se mettre au service de la mitraillette.
-J’avoue que je ne pige rien. Je ferai mieux de retourner à mes vaches et brebis.
-Je suis borgne, mais vous êtes aveugles. Le borgne est roi au pays des aveugles. Cela fait plus de 25 ans qu’on vous joue la même comédie et vous ne pigez toujours pas grand-chose. Tant pis pour vos gueules !

8 avril 2014 2 08 /04 /avril /2014 17:46
Le Bachagha Ouyahia, dixième président de la république algérienne.

Radjef Said

En dépit de toutes les affiches et placards qui auréolent les villes du pays, rien n’indique qu’on est à la fin d’une compagne électorale dont l’enjeu est la conquête présidentielle. Tout est si terne et si morose. Les gens dans une indifférence glaciale, passent et ne prêtent même attention à tous ces coups de publicité et autres slogans suspendus à la gloire du passé révolutionnaire du peuple. Même les escarmouches (téléguidées des laboratoires de la police politique) qui ont momentanément secoué quelques villes à l’occasion du passage d’un tel candidat ou d’un tel autre, n’ont pas réussi à mettre de la vie dans une compagne qui est arrivée à son terme, sans susciter la curiosité et l’engouement des populations. En Algérie, et, ici, tout particulièrement en Kabylie, le temps a convaincu de manière invisible la majorité des populations que le régime ne peut pas organiser d’élections démocratiques. Pour la majorité écrasante de la population qui ne se reconnaît dans aucun parti politique, le scrutin du 17 avril n’est qu’une ruse visant à camoufler les tares d’un pouvoir autoritaire et rentier qui ne fonctionne qu’avec la trique, le mensonge et les pots -de -vin. Quiconque à des yeux pour voir et une cervelle pour réfléchir comprendrait que la corruption régule tout dans ce pays. Le sujet de la corruption est sur toutes les langues.
Les expériences passées ont persuadé les citoyens que le temps des partis politiques était terminé. Cette conviction s’est enracinée dans un constat : le système politique connaît, depuis les années 1990, une dégénérescence accélérée. Certains parlent de « gangrène » et de « putréfaction ». La corruption s’est généralisée et a pris des proportions hallucinantes. Le système de pots-de-vin coûte au pays des milliards de dollars chaque année… Le financement occulte est devenu une fatalité. Outre la clochardisation des institutions, il a non seulement favorisé un fabuleux enrichissement des principaux dirigeants militaires, mais il a empêché l’armée de se pilier à ses missions constitutionnelles.
Cependant, par moments, le scrutin du 17 avril sujet de sarcasme et de dérision, fait sourire les uns et les autres. « C’est une élection sans candidats », ironise un citoyen à Boghni. Les gens n’arrêtent pas de s’interroger comment l’armée a-t-elle accepter de faire du président sortant, A Bouteflika, un homme chancelant, usé par de nombreuses maladies et dont les jours sont désormais comptés, son candidat. « C’est parce que l’armée garde au chaud son vrai candidat », rétorquent les uns et les autres. Et qui est donc cet heureux candidat que les généraux gardent au chaud ? Ahmed Ouyahia ! Pourquoi Ahmed Ouyahia alors qu’il ne figure même pas parmi les candidats qui ont postulé aux plus hautes destinées du pays ? « C’est ça qui fait le génie des généraux algériens », explique un universitaire à la retraite, à Tizi ouzou. Le nom de l’ex chef du gouvernement revient avec instance. Ou que vous alliez, dans les cafés, dans les bars, dans les mosquées et les grandes villes périphériques du Djurdjura, son nom est cité comme le dixième président de la république algérienne. Produit d’un compromis entre les différents clans du régime pour sauver le système, il sera conduit à son tour dans un char aux plus hautes destinées du pays. A vrai dire, depuis quelques temps déjà, malgré les diversions de la presse qui fait tout pour détourner le regard de l’opinion sur de fausses cibles, tout le monde arrive à lire dans les pensées de l’armée algérienne. Tout le monde a évolué dans ce pays, sauf nos caporaux. Pour reprendre un peu notre ami Said Saadi, nos caporaux ne retiennent jamais leurs leçons ; ce sont de multi récidivistes. Ouyahia ne sera pas le produit du suffrage universel, mais du viol de la loi fondamentale du pays appelé pudiquement révision de la constitution.
Tout comme les citoyens qui n’ont plus aucune confiance dans leurs dirigeants, les militaires eux aussi pensent que les ardeurs du changement ont été définitivement inhibées par tant d’années de violences, de corruption et de rente. Le peuple a été suffisamment abruti pour pouvoir se soulever contre le viol de la constitution qui placerait d’ici deux semaines à peine Ouyahia comme premier vice président de la république et probablement président de la république d’ici deux ou à sept mois, c’est-à-dire lorsque Bouteflika aura été déclaré inapte à poursuivre son quatrième mandat.

2 avril 2014 3 02 /04 /avril /2014 17:09
Y a-t-il encore des militants en Algérie ?

Saïd RADJEF

Certains partis s’apprêtent à fêter la journée de militant, mais que signifie au juste le mot militant en Algérie ? Au cours de ces vingt dernières années, on a assisté à une multiplication de partis politiques dont la majorité se réclame de l’opposition. Cependant, aucune étude scientifique ou journalistique n’a été établie sur les raisons du militantisme, les pratiques, les traditions et les comportements des militants, les caractéristiques spécifiques de chaque formation politique selon l’organisation d’appartenance doctrinale ou philosophique. Depuis la loi de février 1989 autorisant les partis politiques, aucune approche théorique, aucune approche descriptive monographique, aucune approche socio-démographique ou psycho-sociologique n’a été entreprise par nos élites bien pensantes. Dans sa littérature foisonnante qu’elle consacre quotidiennement aux partis politiques, la presse ne fait aucune étude sur le militantisme. De même, nos sociologues et nos politologues qui s’intéressent de plus près à la sociologie électorale refusent comme objet d’étude et de recherche le militant et l’adhérent. Ce constat est d’autant plus paradoxal que l’une des analyses classiques du phénomène partisan est l’approche organisationnelle qui concerne justement les structures partisanes, les degrés d’adhésion et la répartition du pouvoir au sein des partis politiques. Sur quels critères peut-on se baser pour affirmer que tel parti est un parti de masses, tel autre est un parti de cadres et tel autre encore est un parti d’électeurs ? Comment peut-on savoir que tel parti est conservateur, tel autre est réformiste et tel autre encore est néo –libéral, alors qu’aucune étude ne rend compte sur ce qu’est au juste le militant dans notre société ? Comment peut-on faire une distinction entre militant, adhèrent et sympathisant, alors que tous les partis sans distinction aucune refusent d’investir dans le travail de la formation ? C’est quoi au juste un militant ? Selon toutes les définitions, le militant qui vient du latin miles, militis (soldat) concerne les personnes qui se battent culturellement, intellectuellement, les armes à la main, pour défendre leurs idées et les convictions de l’école de pensée à laquelle ils appartiennent. A la lumière de cette définition, que peut-on dire de tous ces nomades politiques qui désertent les formations ou ils ont occupé de hautes responsabilités pour aller rejoindre des partis dont ils ont auparavant condamné la démarche ? Comment peut-on interpréter les revirements idéologiques de nos partis qui ne s’embarrassent d’aucun scrupule pour trahir les idéaux et les convictions dont ils étaient la veille les champions ? A quels moments ces illustres militants ont été sincères dans leurs démarches ? Déjà en 1990, alors que la compagne électorale battait son plein, deux grands dirigeants du PPA-MTLD encore en vie interrogeaient sur le ras de marée de militants qu’ont vécu quelques partis politiques : « Comment peut-on parler d’opposition lorsque neuf cadres supérieurs sur dix d’un parti ignorent tout de la doctrine et de la philosophie de la formation à laquelle ils appartiennent ? » Et d’ajouter : « Beaucoup sont des instruments inconscients de la propagande du régime dont ils disent être les adversaires acharnés. » Bien sur les services de la police politique qui n’avaient en face d’eux aucun adversaire politique, ont compris tous les avantages qu’ils pouvaient tiré de ce populisme ambiant dans lequel baignait la majorité des partis politiques. En effet, sans chercher à blesser quiconque, dans un climat de « moukhabaratisation » sans précèdent, il suffit de jouer à la victime de la police politique ou de cataloguer quelqu’un d’appartenance aux « services » pour gagner ses galons de militant dirigeant et devenir une référence politique au sein de sa formation. Certains fraîchement militants revendiquaient un passé d’opposant alors que de 1965 à 1980, hormis la dévolution du pouvoir qui s’est poursuivie après le Congrès de Tripoli et qui a opposé les dirigeants de l’insurrection armée de novembre 1954, aucune arrestation, aucune exécution n’est venue obscurcir le ciel bleu d’Algérie, ni dans la société civile, ni dans le milieu universitaire.

1 avril 2014 2 01 /04 /avril /2014 17:12
Messieurs les « décideurs », arrêtez la mascarade du 17 avril !

Said RADJEF

Date fondatrice de l’État algérien, le 1er novembre 1954 symbole à la gloire inaltérée, constitue néanmoins une source de légitimité à un régime militaire plus que jamais schizophrène. Un régime schizophrène qui ne reconnaît ni sa maladie ni ses limites politiques et intellectuelles, et dont les symptômes se manifestent avec plus de violence au fil des années. Les points d’ombre qui l’entourent ont depuis été attribués à la nécessité prétendument inévitable de garantir la stabilité d’un pays fraîchement indépendant encore menacé par les frères marocains, déchiré par la guerre et déséquilibré par la lutte des clans à Tripoli. Pourtant, ces épisodes ou plutôt pour dire vrai, ces complots tissés avec l’aide de la colonisation révèlent l’inavouable nature d’un régime qui semble de plus en plus incapable de comprendre les fondements d’une nation et la réalité politique d’un pays, de tenir ses promesses égalitaires. Tous les principes ancrés dans la démocratie et la citoyenneté, le régime les perçoit comme une menace, une persécution.
On se croirait dans l’un des ouvrages d’Alexandre Zinoviev !
Certains symptômes de la schizophrénie ressemblent à ceux d’une crise d’adolescence tourmentée : repli sur soi, incapacité d’agir, difficulté à communiquer, sautes d’humeur. Mais aujourd’hui, cette maladie dont nombre de psychiatres et de psychanalystes dit qu’elle est d’ordre génétique (fatalité héréditaire, après tout l’ANP est la digne héritière de l’ALN !), a atteint des seuils alarmants. En effet, il y a des raisons de s’inquiéter, car tous les symptômes, c’est-à-dire le délire, le mensonge, les hallucinations, l’incapacité à communiquer et les troubles de langages, sont tous réunis et apparaissent au grand jour, lors de cette compagne électorale d’inspiration militaire et non politique.
Dans cette compagne électorale, une phrase phare revient sur toutes les lèvres des candidats : « La jeunesse algérienne doit voter massivement pour assurer son avenir et maintenir la cohésion de la nation algérienne. » Comment cette jeunesse peut-elle donc assumer son destin lorsqu’on la force à élire un président, celui de l’armée, qui non seulement est cliniquement mort, mais appartient à une époque qui patauge dans la fange de l’histoire ? Et d’ajouter sur un ton menaçant : « Si vous ne votez pas le 17 avril, le pays va s’écrouler. » Ou encore : « La jeunesse algérienne regorge de talents, de compétences et d’aptitudes. » Pourquoi dans ce cas précis confier les destinées d’un pays à la croisée des chemins, à un homme inapte intellectuellement et politiquement à gouverner, à distinguer entre le mal et le bien, entre le mensonge et la vérité ?
Il n’y a aucun doute, le régime est dans une phase d’hallucination très avancée. Outre qu’il perçoit des choses inexistantes qui lui semblent réelles, mais il ne reconnaît plus les réalités du moment, il ne reconnaît plus que les époques et les modes de gouvernance ont changé à travers tout l’univers.
La république, la démocratie et les valeurs citoyennes lui reviennent comme des penses très lourdes a porter, comme des images et des voix d’où peuvent surgir des ennemis monstrueux. Face la demande citoyenne, nos généraux après avoir inventer la menace terroriste, ils hallucinent à présent la main de l’étranger avec laquelle ils viennent juste de parapher un accord de partenariat faisant de l’Algérie une zone de libre échange, en train de conspirer et de mettre sur pied des complots pour diviser le pays et piller ses richesses. Ambiguïté hautement schizophrène. La menace et le complot sont des thèmes récurrents chez le régime algérien ; des thèmes qui lui ont certes permis de gagner encore un peu de temps par le passé, mais qui ont fait haïr la politique au citoyen, clochardiser les institution et éparpiller (démobiliser) le peu d’élites que le pays compte.

26 mars 2014 3 26 /03 /mars /2014 09:39
Au pays des 1400 généraux et colonels.

Saïd RADJEF
Miracle ! L’Algérie est un pays ou les miracles s’accomplissent les uns après les autres. Un pays de prophètes ! Sans écoles militaires, sans la moindre conquête et sans guerre hormis celle imposée au peuple désarmé, l’Algérie a produit plus de généraux et de colonels que deux puissances colonialistes réunies, depuis 1962 à ce jour. Le pays compte aujourd’hui environ 1400 généraux et colonels. Mais dans les faits, que représentent ces 1400 généraux et colonels qui détiennent la totalité du pouvoir, sur l’ensemble de la population globale du pays ? 1% ? 0,10% ? Quelle est la masse salariale de ces 1400 généraux et colonels qui ont le droit de vie et de mort sur chacun d’entre nous ? Quelles sont leurs capacités intellectuelles, morales et politiques, aujourd’hui que le pays est classé culturellement loin derrière les pays du Sahel ?
Ces généraux et colonels peuvent-ils comprendre la portée d’un mouvement de réconciliation, saisir l’opportunité d’un processus de négociation pour la paix et le rétablissement de l’ordre politique, critère qui fait d’un pays une Nation ? Comment peut-on participer à une élection dont l’issue est connue d’avance, mettre du mouvement dans le statu quo lorsque le mouvement de réconciliation nationale veut ignorer cette réalité et le contexte historique de l’Algérie pour se focaliser sur une nébuleuse difficile à cerner. Certains se sont offusqués à l’idée qu’on ne soit pas mobilisés aux cotés de celles et de ceux qui appellent au boycott de la candidature de Bouteflika. On n’est pas contre Bouteflika, on est contre le régime autoritaire ou 1400 généraux et colonels font et défont les présidents,depuis Ferhat Abbas à ce jour.
Sans véritable réconciliation nationale, l’Algérie peut-elle organiser la moindre élection ? Sur les termes de cette réconciliation, le régime est non seulement silencieux sur les acteurs qui doivent la mener et la guider, sur le processus et les procédures à mettre en œuvre pour sa réalisation, mais il nous force a accepter une amnésie nationale dont se servent aujourd’hui, sans vergogne, celles et ceux qui ont accepté hier de servir d’alibi démocratique et d’instrument politique entre les mains d’un régime des plus sadiques, des plus pervers et des plus pernicieux dans l’histoire de l’humanité ?
Il est vrai que toute initiative citoyenne a besoin d’union, de rassemblement et de réconciliation. Sans ces trois conditions, aucune initiative politique n’est possible. Quelles sont dans ce cas les parties à réunir, à rassembler et à réconcilier éventuellement pour permettre au pays d’en finir avec les crises politique, culturelle, identitaire et civilisationnelle qui le menacent dans sa survie ? A part le peuple, les victimes et leurs familles, s’agit-il des docteurs Petiot qui ont servi d’éclaireurs aux criminels dans les rangs de l’opposition, les droit-de-l’hommistes qui ont applaudi le coup d’État du 19 juin 1965, les généraux GLD de la presse, de la république et de la démocratie, les gardes communaux, le Borgne, Hassan Hattab…? En Algérie, le terrorisme ne se limite pas seulement à des actions militaires visant à terroriser le peuple. Il va au-delà de ce seuil pour se confondre dans l’innommable tragédie du terrorisme moral et politique. Le pays compte aujourd’hui autant de délateurs que les USA et la fédération de Russie réunis. Sur les deux millions de bacheliers que compte le pays depuis 1962 à ce jour, les 1400 généraux et leurs supplétifs ont exilé plus d’un million…Plus d’un million d’universitaires algériens se baladent dans les quatre coins du globe, le plus souvent rémunérés comme des esclaves des temps modernes, alors que le pays si riche et si vaste a un besoin urgent de compétences, de talents, d’intelligence pour se hisser au rang de véritable nation, relever les défis du moment et faire face au gangstérisme scientifique de la mondialisation que brandissent à tous les virages les maîtres de haute finance internationale et de la grosse industrie militaire.
Sans devoir de vérité, un rassemblement, une union peuvent-ils réussir à venir à bout de ce régime autoritaire ? Faut-il faire table rase de la tragédie et inclure les tortionnaires, les corrupteurs, les délateurs, les assassins des forces de sécurité, les fausses notabilités enfantées par le ministère des anciens moudjahidine et les apparatchiks de l’armée ? Quels sont les crimes acceptables, les crimes à pardonner ? Certains justifient leur démarche en invoquant un virtuel danger qui menacerait le pays d’éclatement. Ce discours fait le délice des brigands du régime. Que le pays s’éclate ! Ce n’est pas la menace de la main de l’étranger qui va faire asseoir à la même table la victime et le bourreau autour d’un même idéal ! Ce n’est pas la menace de la main de l’étranger qui va construire une initiative citoyenne, amorcer la dynamique du changement et inciter les algériennes et les algériens à se rassembler autour d’un seul et même mot d’ordre. Ce n’est pas non plus le départ de Bouteflika qui va ramener la démocratie et l’alternance du pouvoir dans notre pays. C’est le devoir de vérité et le retour des 1400 généraux et colonels dans les casernes qui peuvent rassembler et unir le peuple, et protéger le pays de toutes les menaces.

21 mars 2014 5 21 /03 /mars /2014 17:03
Généraux, pourquoi on va boycotter votre comédie du 17 avril.

Saïd RADJEF

« Cette grande reforme, comme vous pouvez le voir, peut être réalisée sans verser une goutte de sang, sans violence, sans enfreindre la loi humaine ou divine. Si un homme abuse de son autorité, si un homme prend par la force une ferme d’où un pauvre est expulsé, je vous conjure de ne lui faire aucun mal physique. Agissez envers lui comme la Reine d’Angleterre le ferait envers vous. Elle ne vous considérerait pas comme ses égaux, ni vous, ni votre femme, ni vos enfants. A présent, imitez la Reine d’Angleterre et ne parlez ni à un propriétaire terrien qui abuse de son autorité, ni à sa femme, ni à ses enfants. S’il vient en ville et veut vendre quelque chose, ne le violentez pas, ne lui faites aucun mal physique. Si vous le voyez entrer dans un magasin pour acheter du pain, ou des vêtements, ou même du whisky, allez voir immédiatement le commerçant pour qu’il se rétracte…Dites seulement au propriétaire terrien qui abuse de son pouvoir que d’après la loi britannique, il a le droit incontestable d’acheter ou de vendre ses marchandises à n’importe qui, mais qu’il n’existe aucune loi en Grande Bretagne qui vous oblige à lui vendre ou à lui acheter quoi que ce soit, et que vous ne le ferez jamais aussi longtemps que vous vivrez. »
Voila ce qu’écrivait un journaliste américain, pour relater l’action menée à l’encontre des propriétaires irlandais en 1880. Comme le premier individu mis ainsi à l’index s’appelait Charles Cunningham Boycott, le maire Redpath et un prêtre, le père John O’Malley, eurent l’idée d’appeler boycott toute action visant à mettre en quarantaine tous les propriétaires terriens qui abusaient de leur autorité et de leur pouvoir.
C’est quoi une élection dans un régime autoritaire ? Une élection dans un régime autoritaire est un grand marché ou le régime occupe par la force, la violence, la corruption et la ruse d’immenses stands pour exposer sa marchandise et vendre ses produits.
Le régime autoritaire et le pouvoir personnel se construisent sur la condamnation de la démocratie et de ses valeurs de pluralisme, d’alternance et de tolérance. Ainsi, les libertés individuelles, l’Histoire, l’imaginaire collectif et la libre pensée disparaissent au profit du pouvoir personnel, du culte de la personnalité, de la propagande, du mensonge, de la schizophrénie collective et des chimères politiques. C’est une expropriation morale et intellectuelle de la nation algérienne !
L’État autoritaire est omniprésent dans la société que l’on cherche à soumettre. Bouteflika et l’armée sont tout. La république, la citoyenneté et l’Algérien ne sont rien.

Depuis 1954 à ce jour, l’Algérie s’incarne dans un modèle, le chef charismatique, otage des caporaux, et probablement l’outil qui va légitimer un autre coup d’Etat après le scrutin du 17 avril prochain. Issus du peuple, contrairement à d’autres régimes, Bouteflika et les généraux sont des guides, des protecteurs, des moudjahidines prêts à mourir pour la patrie contre la menace terroriste qu’ils ont eux-mêmes fabriquée, des initiateurs de la grandeur retrouvée, les artisans de la paix et des grandes réalisations, des incontestés et infaillibles des combats pour la libération des peuples…Flattant, galvanisant les foules, le chef charismatique entretient cette adhésion populaire, cette ovation qui fait fondre le froid des Aurès et du Djurdjura en communion entre le tyran et la victime.
Bouteflika est l’instrument avec lequel le régime compte se régénérer. Mais quel beau rôle pour les généraux lorsqu’ils auront destitué un homme usé par la maladie et dévoré par le pouvoir personnel ! Une fois de plus, nos caporaux à la noix de coco vont se présenter lorsqu’ils auront fini d’instrumentaliser la carcasse et les restes d’un président otage, comme les sauveurs de la république et de la démocratie !
Certains parmi nos amis au sein de la gauche et du FFS, ainsi que nos camarades au sein de la mouvance islamiste qui appellent de tous leurs vœux à une participation massive, doivent comprendre que le scrutin du 17 avril prochain est une étape d’un complot dont la finalité n’est rien d’autre qu’un coup d’Etat qui va fournir l’occasion aux décideurs au sein de l’armée de se prévaloir d’une certaine légitimité. Il n’y a aucun bien dans ce régime. Il ne porte en lui aucun instrument qui puisse permettre à la classe politique de mettre du mouvement dans le statu quo, de construire une démocratie et de rétablir l’ordre moral, citoyen et politique sur son trône naturel. Tout est ruse, tout est trahison en lui. Ses gènes sont faits du mal.
Comment peut-on participer à ce scrutin lorsque le principal candidat, otage d’une poignée de généraux, est cliniquement mort depuis bien des mois ? Il ne s’agit pas de boycotter Bouteflika, le scrutin du 17 avril, mais il s’agit de déjouer un complot par lequel les militaires comptent confisquer le pouvoir politique qu’ils détiennent sans partage depuis 1954. Il s’agit de libérer Bouteflika et d’empêcher le régime de l’utiliser comme un instrument pour un autre coup d’Etat après l’élection présidentielle.
C’est là toute la marchandise que compte nous vendre le régime pour assurer sa survie. Mais si nous refusons d’acheter sa marchandise, il va faire faillite et baisser rideau…Bouteflika n’existe plus. C’est un produit avarié. Les décideurs veulent le mettre sur le marché pour le retirer ensuite pour donner l’impression au peuple que les dirigeants sont au service de la démocratie et contre la contamination des principes fondateurs de la république…

11 mars 2014 2 11 /03 /mars /2014 14:59
Pourquoi l’armée a-t-elle si peur de l’alternance ?

Saïd RADJEF

De plus en plus, l’indépendance de l’Algérie ressemble à un monument inachevé dont l’architecte a disparu, parce qu’assassiné par une bande de bricoleurs qui pensent que construire un État nation est un jeu d’enfants. Plus d’un demi siècle après l’Appel du 1er novembre 1954, les fissures apparaissent au grand jour alors que l’avenir du pays reste des plus incertains. C’est l’écroulement, le naufrage.
Dans le livre saint du Coran, Dieu a vivement recommandé à l’homme de se plier aux exigences de l’alternance et de la concertation.
Qu’en est-il de l’Algérie, des dirigeants algériens qui sont au pouvoir depuis plus d’un demi siècle ? Comment ces dirigeants considèrent-ils le peuple ?
A la fin des années 1980, après plusieurs années de régime autoritaire et militaire, l’Algérie rétablit le système multi partite. Dans l’enthousiasme du moment, des dizaines de partis ont été crées, alors que d’autres, plus anciens, ont été reconstruits avec l’objectif d’accéder au pouvoir exécutif suprême et de rendre au peuple sa souveraineté. Cependant, depuis aucun parti de l’opposition n’est parvenu à réaliser cet objectif pourtant largement partagé par l’immense majorité du peuple. Les immenses espoirs de « véritable alternance» que ces partis politiques ont suscité au début de la décennie 1990, se sont vite tournés en cauchemar avec une guerre imposée au peuple dont nous ressentons à ce jour les répliques. A chaque escale électorale, l’armée brouille la visibilité politique en superposant à la classe politique des mouvements de protestation à l’instar des Arouchs et de Barakat, et avec une habilité de prestidigitateur sort à chaque fois de son char le candidat du moment.
Ceci problématise la situation et conduit à la question suivante: comment expliquer à chaque fois la réussite d’un régime pourtant honni par la majorité écrasante du peuple et l’éternel échec des partis de l’opposition à conquérir le pouvoir exécutif? Quelque chose ne tourne pas en rond. Quelque soit le système électoral retenu, c’est toujours le candidat du régime qui l’emporte dés le premier tour haut la main ! Les structures internes et le niveau de démocratie au sein des partis politiques de l’opposition seraient-ils défaillants au point de ne plus pouvoir faire face à un régime qui chancelle, qui prend de l’eau de toutes parts ? Y aurait-il des contraintes intellectuelles, institutionnelles et politiques qui empêchent ou réduisent considérablement les chances des partis d’opposition de construire une coalition, de gagner les élections et de conquérir le pouvoir suprême ?
Pourquoi depuis plus d’un demi siècle les choses vont de mal en pis pour les élites politiques algériennes ? Pourquoi en est-il ainsi? Le fantôme FLN décédé dans son placenta en 1957 et le parti cocote minute du RND seraient-ils plus solides, mieux organisés, voire plus populaires que les partis d’opposition? Y aurait-il un déficit organisationnel ou déficience stratégique de la part des partis d’opposition? Pour bon nombre d’observateurs de la politique et presque tous les leaders vaincus de l’opposition, la réponse est simple: les partis au pouvoir s’ y maintiennent grâce au truquage des processus électoraux et au soutien indéfectible de l’armée.
A moins que les stratèges du DRS aient une autre définition sur la démocratie, tous les théoriciens de la « démocratie» renvoient l’origine étymologique du terme aux deux mots grecs (demos + kratos), lesquels signifient littéralement « le pouvoir du peuple ». L’alternance et la démocratie présupposent une liberté dans laquelle le système de relations entre gouvernants et gouvernés est régi par le principe selon lequel l’État est au service du citoyen, et non l’inverse. C’est un système dans lequel les gouvernés choisissent librement leurs gouvernants qui les représentent. En quoi une telle situation est-elle donc une menace pour la survie de l’ANP ? Il ne viendrait à l’esprit d’aucun opposant algérien de mettre en péril l’avenir de l’armée. Pourquoi l’ANP s’obstine t-elle alors à maintenir un climat politique des plus délétères dans un régime arrivé à sa fin biologique qui risque de l’embarquer à nouveau dans une autre tragédie, alors que le principe de l’alternance constitue la meilleure garantie pour sa survie ? Pourquoi les principes de la démocratie et de l’alternance font-ils si peur aux généraux décideurs qui détiennent la réalité du pouvoir depuis le 1er novembre 1954 à ce jour, car depuis il n’y a eu qu’un seul et même pouvoir? Les opposants seraient-ils moins algériens, moins patriotes et moins compétents que le candidat Bouteflika qui a entamé sa compagne électorale depuis plus d’une année, en violation des règlements en vigueur ? En quoi reconduire un homme cliniquement mort pour un quatrième mandat successif est-il plus sur pour l’avenir de l’armée que les vertus de la démocratie et de l’alternance ?

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