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8 mai 2011 7 08 /05 /mai /2011 09:40

Paris, le 8 mai 1987

 Déclaration

 Nous voulons simplement à l'occasion du procès de Klaus Barbie mettre en clair certaines vérités historiques, et rappeler quelques principes pour nous Algériens, qui avons lutté pour l'indépendance de notre pays. Me Jacques Vergés cherche aujourd'hui à associer des "crimes contre l'humanité" commis par Klaus Barbie aux "crimes de guerre" perpétrés par l'ex-puissance coloniale en Algérie et cet amalgame trouve parfois malheureusement crédit dans notre pays.

 Nous nous levons contre cette grossière manipulation. Manipulation morale d'abord, car on défend pas un tortionnaire, Barbie en l’occurrence en exhibant d'autres tortionnaires, fusent-ils ses ennemis d'hier. Manipulation de la vérité historique ensuite car notre combat de la résistance française durant l'occupation allemande, donc au combat contre les Barbie bourreaux français. C'est du reste cette identification qui a  incité nombre de français qui ne voulaient pas que l'histoire se passe truquée, à se solidariser avec nous. Manipulation juridique enfin, car la défense des droits de l'homme devant les cours françaises durant la guerre d'Algérie trouve sa suite logique dans la défense des droits de l'homme dans les pays nouvellement indépendants et non dans celle d'un homme Barbie, dont la victoire aurait signifié l'extermination des Juifs et celle de l'ensemble des Sémites, puisque selon l'idéologie nazie, ceux-ci étaient tous aux flammes.

Si nous, Algériens, nous devions avoir une quelconque place dans ce procès, ce n'est pas comme témoins à décharge de Barbie, mais comme témoins à charge au nom des droits de l'homme qui légitiment notre propre combat.

HOCINE AIT-AHMED                       MOHAMMED HARBI
Juriste                                                     Historien 
Membre fondateur du FLN.                  Ancien dirigeant du FLN

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3 mai 2011 2 03 /05 /mai /2011 21:56

Hocine Aït Ahmed est président du Front des forces socialistes (FFS), parti à la base populaire affirmée en Kabylie. Membre fondateur du Front de libération nationale (FLN), il défend le multipartisme dès 1962 et devient le symbole d'une opposition démocratique sans faille. Agé de soixante-quatorzeans, il poursuit aujourd'hui son combat politique depuis son exil en Suisse.

"Alors que la tension semblait retomber un peu en Algérie, vous avez lancé, mercredi, un avertissement à la communauté internationale, évoquant un possible bain de sang. Y a-t-il des éléments nouveaux qui expliquent cette inquiétude grandissante?

 – Nous ne cessons, depuis des années, de mettre en garde sur les risques d'explosion en Algérie et en Kabylie. On a trop voulu se fier aux apparences età l'image que veulent donner d'eux le pouvoir et Bouteflika, en négligeant la souffrance des Algériens. On a trop voulu croire qu'ils pourraient indéfiniment accepter de ne pas être considérés comme des hommes dans leur propre pays, de mourir de faim, quand des fortunes immenses s'étalent avec arrogance. On n'a même pas voulu donner un sens aux suicides qui se multiplient dans le pays et qui sont le signe d'une immense détresse sociale.

Sous prétexte des atrocités commises par les islamistes, on a fermé les yeux sur les exactions commises par les forces de sécurité sur une population désarmée, sur l'humiliation, la "hogra" (l'abus de pouvoir), sur les résultats frauduleux des élections. Il ne faut pas s'étonner que le meurtre d'un innocent dans une gendarmerie soit la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Cette révolte s'est exprimée d'autant plus violemment que les provocations – celles des gendarmes notamment – n'ont pas cessé. Tout ce à quoi on refuse la libre expression publique ne disparaît pas pour autant. Il y a la ruse de l'histoire, les peuples procèdent à leur propre maturation à l'abri des dictateurs.

 – Le pouvoir vous semble-t-il avoir pris la mesure de l'avertissement que vient de lui lancer la population?

 – Ce qui manque le plus à la réflexion et à l'action du pouvoir algérien, c'est le sens des responsabilités. Ceux qui sont à la tête de l'Etat sont irresponsables car ils n'ont jamais rendu de comptes à qui que ce soit. Prenez le discours de Bouteflika, en essayant de passer sur le dérisoire, voire l'insultant, qu'il y a à annoncer, après douze jours de silence, des dizaines de morts et des centaines de blessés, la constitution d'une commission, classique des pratiques staliniennes. Le chef de l'Etat ne pouvait pas mieux démontrer la rupture totale, éclatante, du pouvoir d'avec la population. Comment peut-il s'adresser aux Algériens sans rien avoirà leur proposer?

– S'agit-il d'une question d'âge, de génération, comme le dit Saïd Saadi, du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD)?

 – Je pense qu'en effet, la majorité écrasante des jeunes sont marginalisés, frappés de plein fouet par les tueries, la guerre et la misère galopante. Pour toutes ces raisons, ils se fichent de la révolution et du passé. Ils veulent leur présent, ainsi que leur avenir. On leur a d'abord volé leur passé. Quand ils ont vu que la mémoire était truquée, ils ont préféré provisoirement y renoncer. On leur a rendu la vie impossible: rafles, exécutions extrajudiciaires, assassinats de la part des groupes armés, mais aussi confiscation de la parole.

Quand on prive un individu de tout moyen et lieu d'expression, comment peut-il exprimer autrement son ras-le-bol que par la violence? D'autant plus qu'il a le sentiment que seule, la violence est payante. Certains éléments de l'Armée islamique de salut (AIS) ont été amnistiés, alors que la loi sur la concorde civile était supposée refuser l'impunité aux auteurs de crimes de sang, de viols, etc.

La responsabilité du pouvoir est totale : dès l'indépendance, il a confisqué le droit à l'autodétermination des Algériens. La Constitution, en 1963, n'a pas été élaborée par l'Assemblée constituante comme prévu, mais par une petite nomenklatura potentielle. Et depuis lors, l'Algérie n'a eu que des constitutions faites sur mesure, au gré des intérêts des présidents successifs.

 Et voilà qu'aujourd'hui, Bouteflika essaie de faire passer l'idée d'une nouvelle constitution! Eh bien, nous nous battrons pour que les Algériens ne se voient pas confisquer, une fois encore, le droit d'avoir des droits.

 – Quelles sont les premières mesures qu'il faudrait prendre, à votre avis, pour désamorcer durablement la tension en Kabylie?

– La première d'entre elles, ce serait le retrait de la gendarmerie. Depuis longtemps, les gendarmes se livrent à des opérations de racket auprès des gens, selon leur libre arbitre. Ils appliquent une politique destinée à exacerber le mécontentement et à inciter à la violence.

– Quelles seraient les autres priorités?

 – Il n'y a pas d'autre perspective que d'annoncer un retour à la transition démocratique. Toutes les guerres finissent par une discussion. Nous voulons que celle-ci soit transparente. Il faut s'asseoir autour d'une table, tous ensemble, y compris avec l'armée. Nous n'avons jamais été contre elle, au contraire: nous avons toujours voulu associer le pouvoir réel à une solution politique. C'était le but du contrat national de Rome.

– Que pensez-vous du retrait du RCD de la coalition gouvernementale?

– Il n'est sans doute jamais trop tard pour s'apercevoir que le soutien inconditionnel à un pouvoir totalement coupé du peuple ne mène pas loin. En revanche, une surenchère quelconque pour récupérer le ras-le-bol risque d'aggraver un peu plus la situation.

– Vous avez appelé mercredi plusieurs personnalités, dont le secrétaire général des Nations unies et le président du Parlement européen, à intervenir pour "empêcher l'irréparable" en Algérie. Qu'attendez-vous de leur part?

– J'ai lancé cet appel pour prévenir tout dérapage, et pour que les autorités algériennes se sentent mises au pied du mur. Qu'elles assurent l'ordre et la sécurité intelligemment, en particulier pendant les deux manifestations de jeudi après-midi. Cela dit, je persiste à penser que le problème algérien se réglera entre Algériens, et en Algérie. Le but n'est pas, je le souligne avec force, de réclamer quelque intervention extérieure que ce soit. Mais qu'on n'abandonne pas éternellement les Algériens à leur sort. Il s'agit simplement de ne pas prolonger la guerre en assurant l'impunité absolue aux généraux."

 Propos recueillis par Florence Beaugé

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2 mai 2011 1 02 /05 /mai /2011 21:54

Herewith a call dispatched today to:

        Mr. Kofi Annan, Secretary General of the UNO Mrs. 
        Mary Robinson, United Nations High Commissioner for Human Rights Mr.
        George W. Bush, President of the United States of America 
        Göran Persson, President of the European Union, Prime Minister of Sweden
        Javier Solana Madariaga, Secretary General of the Council of the European Union
        Lord Robertson, Secretary General of NATO, and 
        Mr. Antoine Gutères, President of Socialists International, Prime minister of Portugal. 

 

      Urgent Call to the International Community and Institutions to prevent Algeria
                                               from sinking into chaos

 

 Following the provocations and murders perpetrated in cold blood by the police forces - particularly of the paramilitary gendarmes - against young unarmed demonstrators in Kabylia, the number of dead and injured are multiplying and resumes dangerously the cycle of hatred, revenge and killings.

This new national tragedy has just been transplanted on a war with no name, no images, no internal or external recourse and which is at its tenth year. Total impunity covers this pitiless repression, which does not even have the excuse of the struggle against armed Islamist groups. It provokes deep feelings of outrage and revolt against the pouvoir, throughout all the regions of the country.

A mighty will of solidarity has taken hold of the Algerian youth, who constitute three-fourths of the population, and who are theprincipal targets of organized murders as well as the economic, social and cultural consequences of a politics of eradication based on the old schemes and manipulations which are reminiscent of the orthodoxy of security of totalitarianism which have bledHumanity.

The address of the Algerian Chief of State, far from reestablishing trust and giving back hope to the population with the announcement of a peaceful exit from the crisis through credible and concrete measures, has on the contrary exacerbated the discontent and the radicalization of the population.

Algiers, the capital, represents a particularly explosive focus of tensions, with an uncontrollable spreading effect. Only responsible and peaceful demonstrations can provide an outlet to and reduce, even eliminate these tensions.

Thus, our party - The Front of the Socialist Forces (FFS) - as well as numerous actors, lucid and responsible, of the civil society have requested of the competent high authorities the authorization to allow all these youth, whoare worried about the absence of any perspectives, to freely express their thirst for peace, social justice, democracy, and liberty. This peaceful demonstration is due on Thursday, May 3rd in Algiers.

However, it is with anxiety that we see a gigantic military and police apparatus being put in place, not to ensure order intelligently, but, on the contrary, to terrorize and discourage, in a first stage, the demonstrators; then, in a second stage, to repress them in a blood bath which risks being more frightening and catastrophic than the repression of October 1988.

Therefore, I have the honor to request you take - individually and collectively - preventive initiatives to block the irreparable, and to publicly warn the authorities, the military and police commands against the arbitrary and massive use of weapons of war.

 It is time that an end be put to the politics of non-assistance to people in danger, which has lasted for a decade. And which, by encouraging impunity, blows on the deadly torment and risks plunging my country in chaos. With all my respects and high consideration,

The 2nd of May 2001 
Hocine Aït-Ahmed
President of the Front of Socialist Forces

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3 avril 2011 7 03 /04 /avril /2011 21:52

 Chers compatriotes,

 C’est avec une grande fierté que je salue en vous à la fois les citoyens et citoyennes conscients de leur droits et les syndicalistes intraitables sur leur autonomie, qui est la seule garantie de leur fidélité et de leur crédibilité.

Les objectifs de la politique d’éradication apparaissent aujourd’hui clairement aux plus aveugles des clientèles étrangères des Ultras indigènes. D’abord l’éradication du suffrage universel dont le but le plus visible a été l’arrêt de la transition démocratique, suivi de la série interminable des truquages électoraux dignes de la colonisation. Conséquence immédiate : la dynamique de la violence déclencha et ne cesse d’aggraver les engrenages successifs de l’éradication physique. Une guerre de repacification sans pareille allant des assassinats ciblés aux crimes contre l’humanité, et ce, sans que les auteurs et commanditaires quel qu’ils soient ne soient l’objet de jugements publics. Dans une impunité qui, en se banalisant, protège et multiplie les seigneurs criminels de tout bord. Il en découle, sans coup férir, une éradication programmée de la vie publique et des forces démocratiques. A l’exemple des « Pouvoirs Spéciaux » qui ont marqué la guerre de reconquête coloniale, la dictature a fait d’un régime d’exception – un Etat d’Urgence illégitime illégal et éternellement prolongé – un droit commun, sans réglementations précises et sans restrictions, tombant entre les mains d’une infinité de réseaux et de bureaucrates qui s’arrogent non seulement le droit de vie et de mort sur les citoyens mais aussi celui d’interdire et d’étoufferles libertés d’expression et d’organisation politiques autonomes.

La gestion arbitraire et grossière du séminaire, des stages et du congrès du SATEF est l’illustration parfaite d’une volonté d’éradiquer les droits sociaux économiques et culturels de la société civile. Et comme par coïncidence, la Commission des droits de l’homme va étudier précisément, aujourd’hui, le sort réservé à cette catégorie de droits, il est indispensable que vous la saisissiez directement par e-mail ou télégramme d’un message de dénonciation des nombreuses violations auxquelles vous vous êtes heurtés.

 Tant qu’il y aura des Algériennes et Algériens décidés à défendre leur dignité et à se battre pacifiquement pour la restitution au Peuple algérien et aux Algériennes et Algériens leurs souverainetés, il n’y a pas lieu de désespérer de l’avenir démocratique de notre pays.

 Encore une fois bravo et bon congrès.

Fraternellement, Hocine Aït-Ahmed. 
Le 03 avril 2001

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26 mars 2011 6 26 /03 /mars /2011 22:54

Le système tribal fondé sur une parenté ethnique réelle ou mythique existe toujours dans les zones rurales des pays en voie de développement.

 L’effondrement, aux alentours du 15ème siècle, des trois principales dynasties maghrébines a abouti à un démembrement en de multiples royaumes. L’unification administrative réalisée sous leur bannière s’est brisée pour laisser place à l’(ré)émergence des tribus. Celles-ci, libérées de toute arbitrage imposé par une " autorité centrale " tombèrent dans des cycles de guerres inter-tribales. La Kabylie fait exception dans son organisation de type communautaire mais dont l’unité est le village.

 Le Professeur Duverger donne trois exemples de cité - républiques : l’Agora hellénique, les Landsgemeinde ( demi-cantons helvétiques ) et la Djamaa kabyle. Le vote des lois en présence de l’ensemble des villageois, les traditions de débats publiques lié au principe de rès publica. Le conseil du village kabyle est désigné par consensus, pour une courte période ( au moins une année ) il est assisté de représentants des différentes parties du village au sein de Tajmaât, l’instance collégiale du village ( dont certains sont plus collégiaux que les autres pour des raisons sociales ou économiques, presque partout et toujours ).

Le plus souvent les villages se fédèrent à d’autres villages, pour constituer des douars. Sans vouloir idéaliser l’Agora, les landsgemeinde et les djamâa Kabyles comme des modèles de démocratie, puisque les femmes et les étrangers, notamment, étaient exclus du débat et des droits attachés à la citoyenneté antique. Ces franchises seront, du reste, finalement acquises partiellement par les femmes.

 Toutefois, la cité Kabyle engage son honneur à protéger la vie et les biens des étrangers ou exilés qui se mettent sous la protection de Tadjmaât. Pendant des siècles l’Empire romain s’était vu obligé de traiter avec le "Conseil de la Confédération Quinquegentienne " englobant les 5 plus grandes vallées des 2 versants du Djurdjura. Des siècles plus tard, pour sauvegarder leurs institutions ancestrales contre les velléités centralisatrices des dynasties maghrébines, les kabyles ont pris l’initiative d’arabiser les noms de leurs instances villageoises.

 C’est ainsi que le Gouram ( le sage ) chef du village s’appelle l’Amin, l’un des surnoms du prophètes qui signifie intègre et digne de confiance. De même que le conseil du village a pris le nom de Tadjmaât ( la djemâa en arabe ), qui veut dire communauté. Même les autres membres de Tadjmâat, prennent l’appellation arabe de Tamen ( plur. Touman ), celui ou ceux qui se portent garants de la gestion de l’Amine. Les villages et douars ont également fait échec aux tentatives du pouvoir ottoman d’Alger qui, dès le 16e siècle sur les ruines des dynasties maghrébines, s’étaient acharnés à briser ce cadre d’organisation en tentant de ressusciter le système et les conflits tribaux.

 En Algérie le phénomène tribal avait été maintenu par la colonisation. Il avait d’abord été géré par " les Bureaux Arabes " mis en place pendant la longue conquête militaire pour mieux contrôler les régions amazighophones plus difficiles à soumettre. " Les Affaires indigènes" désignent à leurs têtes des caids, des aghas et Bachaghas, dénominations et fonctions calquées sur le modèle " ottoman ". Elles ont pris en compte la spécificité de la Kabylie en nommant des caids à la tête des villages regroupés en douars. Les prédispositions du village kabyle à devenir des municipalités avaient probablement incité le ministre de l’intérieur socialiste Depreux en visite en Kabylie, en automne 1945, après les grandes répressions de Mai 1945 à ériger, à titre d’expérience, le statut de quelques villages ou douars de Kabylie en communes de " pleine exercice". Par opposition aux communes indigènes appelées pudiquement " mixtes ", dirigées par des potentats - administrateurs. A noter que les Djemâas kabyles ont presque toujours réussi à doubler les institutions administratives coloniales.

 C’est elles qui désignent des comités Ad Hoc appelés aussi Djamâa, pour régler des litiges intérieurs, réconcilier des villages d’un même douar. Elles parvenaient même à court-circuiter les méandres de la justice coloniale, en réglant de graves crises entre douars de différentes vallées dont les enjeux pouvaient porter sur des questions de souveraineté territoriale ou des dettes d’honneur par exemple. Les Assemblées communales instituées après l’indépendance avaient une existence fictive et inopérante dans l’ensemble du pays. Leur fonctionnement était faussé par les truquages électoraux, par la primauté du parti unique, l’intrusion généralisée de réseaux mafieux, et la tutelle draconienne et corruptrice des préfets.

 Le vide politique consécutif à l’extinction des libertés d’expression et d’organisation autonomes, a certes rabattu l’opinion vers les mosquées, mais c’est le système ârouch qui, dans les Constantinois récupérera la scène politicarde, surtout électorale au bénéfice des officiers et autres dignitaires de la Nomenclatura. En Oranie et dans le Sud algérien cette prééminence allait plutôt aux confréries religieuses, en bulletins de vote ou en défilés carnavalesques de soutien aux potentats du coin. En Kabylie, ni les ârouch ni les confréries religieuses, n’avaient fait leur apparition pendant les élections municipales de 1997.

 Jamais élections algériennes, même à l’époque coloniale, n’avaient été si ouvertement et brutalement falsifiées, par des commandos fascistes de l’armée, de la police et des milices. Les wilayas de Kabylie ont échappé aux coups de force hystériques grâce a leur contexte sociologico - stratégique. L’habitat n’est pas atomisé comme dans la plupart des campagnes algériennes. Villages et douars formés par des traditions publiques, disons pré-civiques, jaloux de leur souveraineté, et averties contre les techniques de la fraude ont su imposer leur contrôle.

 Une grosse épreuve de falsification de la part du pouvoir aurait provoqué des torrents de révolte que le FFS aurait eu du mal à calmer. Bien sûr, la fraude n’a pas manqué au niveau des listes électorales revues et corrigées par les agents de la DRS nommés à la tête des mairies. Le FFS à remporté 75 pour cent de l’ensemble des APC et des APW ( Conseils de Wilayas ). A Tizi-Ouzou, sur les 67 APC, le FFS en a remporté 48 plus l’APW. A Bejaia, il dirige 36 APC sur 52 et il gère l’APW de Bejaïa. La gestion transparente de ces municipalités en présence des citoyens et citoyennes a permis un dialogue permanent avec eux.

Ces derniers savent le refus des autorités de financer les projets économiques et culturels des APC / FFS. Quoiqu’il en soit, les délibérations des ces communes se font en présence de la population; la distribution des logements sociaux se fait sous leur contrôle, recourant notamment au tirage au sort, mais toujours au profit exclusif des familles en détresse. Cette expérience de gestion détonne, évidemment, avec les pratiques mafieuses qui, ailleurs, constituent la règle et provoquent chaque jour des émeutes. Dans d’autres régions du pays.

 Le pouvoir local FFS gène, par son caractère exemplaire; cependant, il ne deviendra un " casus Belli ", que lorsque le Livre Noir confectionné par nos différents élus locaux et wilayaux publia les noms d’officiers et autres comparses civils, qui avaient fait main basse sur les biens communaux tout en s’adonnant aux spéculations foncières. C’est alors que commença en Kabylie la gestation du futur phénomène ârouch : déjà, le serpent était dans l’œuf : les agents de la police politique, les mafieux nommément désignés par le Livre Noir, les chefs des milices, les officiers de gendarmerie privés de leurs bons d’essence gratuits et autres plus grosses faveurs offerts par les APC de papa, se mirent, alors à multiplier rencontres clandestines harcèlement des commerçants et provocations des citoyens.

 Hocine Aït-Ahmed

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22 mars 2011 2 22 /03 /mars /2011 15:49

 

images.jpgMessage de Hocine AIT AHMED aux Algériennes et aux Algériens

Pour une alternative démocratique et pacifique
Le droit d’avoir des droits.

Les révolutions en cours en Tunisie et en Egypte, la magnifique leçon de courage, d’organisation et de détermination populaire qu’elles ont donné à voir au monde entier nous interpellent directement.
Les développements dramatiques que connait la légitime demande populaire de changement démocratique en Lybie ont révélé au monde les pics de sauvagerie dont sont capables des dictateurs fous n’ayant de compte, à rendre à personne. Et surtout pas à leurs peuples.

La crise algérienne s’inscrit naturellement dans le cadre des crises en cours. Pour autant, il n’est pas question de céder à une quelconque « contagion démocratique » dans l’explication et le traitement de chaque situation nationale.

Deux «  constantes » émergent pourtant de l’ensemble des révolutions en cours dans la région : D’une part l’existence de régimes prédateurs, impopulaires et inaptes à porter la demande de liberté et de dignité de leurs populations. Et d’autre part une forte réaffirmation, par les peuples, du droit d’avoir des droits.
Les algériens, qui se sont de longue date inscrits dans le combat pour la démocratie et le changement de régime, ont pour cela payé un prix très lourd.

Si les mobilisations populaires tunisiennes et égyptiennes nous rappellent dans leurs prémices le »printemps démocratique » (89-91), le scandaleux bain de sang déclenché par El Gueddafi rappelle quant à lui la furie éradicatrice des années 90 qui a déchainé - à l’intérieur et à l’extérieur des institutions- des algériens contre d’autres algériens durant toute une décennie.

C’est pour que l’Algérie n’ait plus jamais à payer un tel prix pour la maitrise de son destin, qu’il incombe aux algériens, dans la diversité de leurs convictions et de leurs appartenances, d’indiquer clairement la voie de la construction politique en alternative à la voie de la confusion et de la violence.

Il est plus que jamais temps de mettre à nu les pratiques de dépolitisation et de désarmement moral propagées par les tenants de la violence.

Trop pressés de substituer leur agenda à celui de la société, ils ont voulu profiter de quelques confusions médiatiques soigneusement entretenues pour semer encore une fois le trouble.

A chaque fois que cela sera nécessaire il faudra apporter les clarifications indispensables à une véritable construction politique nationale, démocratique, populaire et pacifique.

Il serait grave d’oublier le lourd tribut payé par les algériens depuis des décennies. Grave de considérer ces années de terreur et de folie comme une «  simple erreur de parcours » sur laquelle il faut pudiquement tourner la page. Croire cela possible c’est insulter autant l’humanité de ce peuple que son sens politique.

C’est sur un socle d’amnésies successives que les régimes autoritaires post- coloniaux ont bâti, en Afrique et dans les pays arabes, des légitimités factices. C’est sur ces amnésies que des générations de cliques arrogantes et prédatrices se sont arrogé le droit de cracher un révisionnisme insultant à l’égard de nations bafouées.

Le révisionnisme ne consiste pas seulement à nier les luttes populaires d’hier, il consiste également à refuser aux peuples de leur reconnaitre, aujourd’hui, les qualités de maturité, d’unité, de solidarité et de lucidité dont ils ont su être capables hier.

A trop vite oublier que les peuples ont une mémoire, que cette mémoire structure leurs adhésions et leurs rejets, les régimes finissent par perdre tout lien avec leurs sociétés.

Tous les peuples ont soif de liberté.
Tous les peuples ont soif d’égalité, de justice et de dignité.
Tous les peuples mènent des combats et les paient horriblement cher avant de les voir aboutir.

Il ya plus d’un siècle que les algériens ont entrepris leur longue marche vers la liberté et la dignité dans leur acception politique moderne. (La marche est ici entendue dans son sens de mise en mouvement d’une société engagée en profondeur et non pas un bref footing en ville)

Le rajeunissement nécessaire des élites, les nouvelles formes que prennent leurs luttes, l’extension du champ de leurs revendications, qui secoue le vieux fonds classique des combats de leurs aînés, ne doit pas servir à l’odieux dessein de couper les générations en tranches jetables. Le combat pour l’indépendance nationale et le combat pour la démocratie sont indissociables. Ceux qui ont cru que l’une pouvait faire l’économie de l’autre ont fait la preuve de leur échec.

Cette marche sans cesse contrariée vers la liberté s’inscrit dans les combats des peuples du monde pour la conquête de leur souveraineté et de leurs droits. Elle ne relève ni d’une spécificité religieuse ni d’un particularisme régional.

Elle procède d’un élan démocratique pour l’auto détermination collective et individuelle.

D’abord dans le cadre des luttes de libération nationale. Ensuite contre des régimes despotiques et corrompus.

Les luttes anti- coloniales ont abouti à des libérations inachevées. La liberté conquise de haute lutte par les peuples ne s’est pas inscrite dans des Etats, des institutions et des textes capables de les mettre à l’abri des forces hostiles à l’émancipation des peuples, des sociétés et des individus.

C’est la part confisquée de démocratie, de liberté, de souveraineté, de citoyenneté, de justice et d’égalité devant la loi dans la construction d’un véritable Etat de droit qui a troublé les lendemains des indépendances.

Et c’est cette part de liberté confisquée qui revient périodiquement, portée par de nouvelles générations, pour affirmer, haut et fort, que sans liberté des individus et des peuples il n’ya ni indépendance ni souveraineté nationale, ni développement économique, politique et social.

Cinquante ans après la proclamation de l’indépendance nationale, nous voici face aux mêmes absences : Absence d’un Etat de droit, absence de vie politique, absence de constitution digne de ce nom, absence d’institutions légitimes capables de protéger le peuple autant que le pays des abus et d’assurer son droit à vivre dans la liberté et la dignité.

A peine l’indépendance proclamée par le peuple algérien et reconnue par la puissance coloniale ; un régime oppressif n’a ni tergiversé ni hésité avant de confisquer cette indépendance en enterrant les rêves démocratiques, les droits et la liberté.

On ne peut pour autant mettre sur un même plan la détresse et les souffrances des algériennes et des algériens dépouillés au lendemain d’une liberté chèrement acquise et les imposteurs qui ont confisqué leur droit à l’autodétermination.

Ceux qui ont crié sebaa snin barakat ! en 1962 avaient raison d’exprimer leur lassitude, leur trop plein de souffrance et de sang, leur rejet des divisions, leur crainte des guerres de factions.
Mais ils avaient politiquement tort.

Tort de croire que les divergences politiques de fond se règlent par des embrassades.

tort de croire que les promesses d’unité et de fidélité aux principes de la révolution peuvent se suffire de discours.

Tort de croire qu’une constitution n’est qu’une formalité sans conséquence.

Tort de croire que l’indépendance d’une nation et la souveraineté d’un peuple peuvent se suffire d‘une page sanglante vite tournée.
Mais ils avaient raison mille fois raison d’affirmer haut et fort que ce peuple a trop payé de son sang !

Des décennies plus tard, il est non seulement impératif de rappeler que le sang des algériens n’a que trop coulé, mais il est aussi impératif de rappeler que c’est aux institutions politiques qu’il appartient de veiller à ce que le recours à la violence ne soit plus la seule option laissée aux algériens.
Cela s’appelle le droit d’avoir des droits. Et cela s’adresse à tous.
Ici, il faut souligner les convergences de vues qui existent entre ceux qui ont choisi la voie de l’exclusion, à l’intérieur comme à l’extérieur des institutions.

Ni Etat intégriste ni Etat policier.

Le malheur de l’Algérie n’aurait pas été si sanglant, ni son désarroi si profond, si le choix de l’exclusion et de la violence n’avait été le fait que du pouvoir. Il se trouve que des courants au sein de la société se sont construits exclusivement sur l’apologie de l’exclusion et de la violence. Quel que soit le lourd soupçon de manipulation par le pouvoir réel qui pèse sur ces courants, il n’en demeure pas moins qu’une clarification de leur part demeure indispensable pour signifier clairement un saut qualitatif dans la formulation du sacré en politique.

Ce qui est sacré, ce n’est plus seulement le sang déjà versé, c’est aussi la construction d’un système politique qui rende sacrée la préservation du sang des algériens. Et cela ne sera possible que dans le cadre d’un Etat de droit, construit précisément par les gens pour respecter et faire respecter le droit des gens.
Il serait léger de croire qu’il suffirait de dissoudre des institutions ou des partis pour que sortent de leurs décombres d’autres institutions et d’autres partis tous prêts pour un usage démocratique.

Tort surtout de croire que l’union est dans le reflux du politique au profit du fusionnel. Les unions sacrées et les faux consensus ne donnent que de fausses solutions).

A chaque moment-clé de notre histoire nous avons été mis en demeure de choisir entre les instruments du politique et les illusions politiques. A chaque fois nous avons dit non aux illusions et avons mis en avant les instruments du politique.

Un Etat de droit, des institutions fortes de leur légitimité, une justice indépendante, des contre – pouvoirs efficaces, une vie politique démocratique réglée par un contrat national, social et politique qui garantisse les libertés individuelles et collectives au même titre qu’il se porte garant de la justice sociale.

Le droit à la sécurité, au travail, au logement, à une scolarité de qualité, à une santé de qualité, à une justice de qualité, à un environnement de qualité, à une vie culturelle de qualité sont des questions qui intéressent tout le peuple.

Et par ce que ces questions intéressent tout le monde, elles mettent en jeux des intérêts contradictoires.

Comment gérer ces contradictions ?

La révolte d’octobre 88 a porté ces questions à travers l’irruption de la jeunesse dans la rue. Le pouvoir a riposté avec sa violence habituelle en semant la mort et en recourant à la torture.
Les réformes politiques et économiques initiées de l’intérieur du régime, combattues avec violence à l’intérieur et à l’extérieur du régime n’ont pas permis d’éviter la guerre.

20 ans de violences, d’errements sécuritaires, politiques et économiques ; preuve est faite, que le primat du droit peut seul permettre une gestion pacifique de conflits d’intérêts contradictoires.

Nous croyons, pour notre part, que les contradictions se gèrent par la construction d’un rapport de force politique, basé sur les discussions, la négociation pacifique, l’arbitrage, et non réductible par la manipulation, la ruse et la violence.

Nous sommes, aujourd’hui encore, loin d’avoir remporté la bataille de la construction démocratique de la Nation et de l’Etat Algériens. Mais nous n’avons jamais été aussi proches d’en voir les prémisses, portés par des pans entiers de la société. Pour accélérer ce processus, certaines vérités doivent être dîtes.

Ce n’est pas seulement la peur qui se dresse devant la conquête du droit d’avoir des droits.

Casser le mur de la peur, cela n’est pas nouveau :
C’est ce qu’ont fait tout au long de ces années de braise et de sang tous ceux qui se sont levés pour dénoncer la dictature autant que le terrorisme.

Oser clamer haut et fort, en 1992, Ni Etat policier, Ni Etat intégriste, les militants du FFS et tous ceux qui se sont retrouvés à leurs cotés l’ont fait ; c’était autrement plus courageux et lucide de le faire à cette époque que ça ne l’est aujourd’hui, que la jonction des deux options se sont réalisés dans le régime politique en vigueur. Ces deux options sont aujourd’hui discréditées auprès de l’ensemble de la société algérienne.

Casser le mur de la peur :
C’est ce qu’ont fait les familles de disparus depuis des années en bravant la répression et les interdits.

C’est ce qu’ont fait les avocats qui les ont soutenues et aidé à porter leur combat dans toutes les arènes nationales et internationales.

C’est ce qu’ont fait les familles de victimes du terrorisme.
C’est ce qu’ont fait les jeunes de Kabylie en 2001.
C’est ce qu’ont fait les jeunes de Ghardaïa
C’est ce qu’ont fait les jeunes d’Ouargla
C’est ce qu’ont fait les jeunes des Aurès
C’est ce qu’ont fait les jeunes de l’Oranie
C‘est ce qu’ont les jeunes de Constantine.
C’est ce qu’ont fait les femmes de Hassi Messaoud traquées et violentées qui ont osé défier la loi de l’omerta.
C’est ce qu’ont fait les syndicats autonomes qui ont osé construire des rapports de forces en faveur des travailleurs depuis des années.
C’est ce qu’ont fait certaines associations… Et tous ces quartiers d’Algérie rendus furieux par la l’exclusion et la hogra…Et ces bataillons de Harragas…

Et même si cela n’a pas fait tomber le régime cela à participé à mettre en évidence ses tares et ses faillites.

Pour l’autodétermination du peuple algérien.

Il manque pourtant à toutes ces résistances à l’injustice, à la violence et à l’oppression un ancrage social plus large.
Il leur manque l’aide et le soutien de médias libres et crédibles
Il leur manque de se voir et de savoir ce qui les lie et ce qui les sépare et comment ne pas tomber dans les pièges de la division, de la dispersion et de la diversion…

Mais pour autant il serait vain de se mentir et de ne pas voir que le mur de la peur a été remplacé et aggravé au plus profond de la société par un mur de lassitude et de dégoût devant la vénalité et la vassalité des fausses élites imposées à l’ombre de la terreur, de la mafia politico-financière, des élections truquées, des médias sous haute surveillance.

Certes, la proximité des révolutions tunisienne et égyptienne donne un coup d’accélérateur à l’Histoire.

Certes, le contexte international du 21ème siècle ne peut plus se suffire des dictatures impopulaires et corrompues du siècle précédent.

Certes, une époque s’achève avec ses références et ses outils de domination. Une autre est en train d’émerger avec de nouveaux acteurs, de nouvelles générations et de nouvelles méthodes de lutte.

Et, plus que jamais auparavant, la libre auto- détermination des peuples est partout à l’ordre du jour.

C’est pour l’empêcher que des solutions illusoires sont montrées par les mêmes vieilles officines qui ont fait le malheur de ce pays. Des solutions qui mettent de nouveau de côté la mobilisation de la société et son organisation pacifique.

Il est des circonstances de l’histoire où il suffit d’un bulletin de vote pour exprimer l’auto-détermination d’un peuple.
C’est le cas pour mettre un terme à une guerre d’indépendance. Mais pour mettre fin à une guerre de décomposition sociale, l’autodétermination du peuple s’exprime par une large mobilisation de toutes les composantes de la société à l’intérieur de tous les cadres qui sont à sa portée.

Du collectif de quartier au mouvement syndical, de l’association écologique au mouvement d’étudiants et du mouvement des femmes pour leurs droits à celui des lycéens, des chômeurs, de l’organisation autonome des cadres, des intellectuels, des universitaires à l’organisation sérieuse des entrepreneurs et de toutes les corporations.

Pour que la vie des partis politiques ne soit pas qu’une lutte perpétuelle pour le positionnement interne.

Pour que la vie politique nationale ne soit pas mise en hibernation entre deux élections.

Pour que les militants des partis politiques ne soient pas pris en otage par des appareils qui se compromettent à négocier des privilèges indus.

Et pour que le pays ne soit pas en permanence mis en demeure de choisir entre la peste de la guerre civile et le choléra de la dictature politique ou religieuse.

L’autodétermination du peuple doit pouvoir s’inscrire en chaque chose petite et grande de la cité.

Pour que la politique redevienne un acte non coupé de la pratique citoyenne effective. Pour que chaque algérien apporte et assume sa part dans la construction et la sauvegarde de son pays. Une part qui ne peut se résumer au soutien apporté à une équipe de foot- ball ou à un drapeau accroché à un balcon.

Avec le déclenchement d’une dynamique de débat national qui porte sur les préoccupations quotidiennes des citoyens

Avec l’éclairage des intellectuels, des universitaires et des experts engagés auprès de leur société sur la base des préoccupations et des souffrances vécues par cette même société.

Avec la force de conviction et d’engagement des citoyens et des militants, et avec le retour de la confiance en soi et entre soi, le lien social et le lien politique seront de nouveau tissés.

Pour une assemblée constituante.

C’est seulement au terme d’une remobilisation citoyenne et politique des algériens que nous pourrons aborder l’ensemble du processus électoral devant aboutir à une refondation institutionnelle, qui remette les droits des citoyens, leur sécurité et leur développement ainsi que ceux du pays au cœur d’une constitution digne de ce nom, par ce que enfin issue d’une assemblée constituante librement élue par des algériens libres.

Ceux qui participeront à l’élaboration de ce processus seront les premiers algériens véritablement libres, et ceux qui seront partis avant, ne se seront pas battus pour rien.

Hocine .AIT AHMED
Le mardi 22 mars 2011

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19 mars 2011 6 19 /03 /mars /2011 11:24

Chers amis, chers camarades,  

Il y a des moments de l’Histoire que l’on regrette d’avoir eu à vivre,  les dérives sanglantes des années 90 et 2000 font partie de ces moments douloureux. 

 

 Mais il y a des moments qui peuvent être formidables à vivre. Aujourd’hui, qui a commencé avec le Printemps de Tunis, fait partie de ces moments où les femmes et les hommes d’un pays sont appelés à donner le meilleur d’eux-mêmes.      Notre pays ne fait pas exception. Et comme je le souligne dans un texte que je compte rendre public dans les prochains jours, faire partie du mouvement de l’Histoire ne signifie pas copier mécaniquement ce qui se passe chez les voisins.  

 

 On ne peut faire l’Histoire en négligeant son histoire. Et notre histoire récente a montré les limites sanglantes des aventures que l’on engage la fleur au fusil et que l’on termine sur un champ de ruines.      

Ce moment est un moment important.  

 

 Important pour la construction d’une alternative démocratique à l’échec autoritaire.     

A cet effet, je ne soulignerais jamais assez, que le génie populaire algérien, inspiré, non par la peur comme veulent le faire croire certains, mais  par la sagesse l’éternel esprit de résistance, saura inventer les voies et moyens d’un changement pacifique. 

 

 Ce fameux fighting spirit  a illuminé le mouvement national et nous tient toujours debout.  

Les vieux sages de chez nous ont toujours enseigné qu’il faut savoir résister à l’ennemi étranger autant qu’à l’adversaire local. Mais ils nous ont également mis en garde contre nous-mêmes: nos passions et nos emballements irraisonnés. 

 

L’homme d’honneur est un homme qui ne s’engage pas à la légère et qui n’engage pas les siens à la légère. 

C’est au prix de la maitrise de soi que l’on peut parvenir à la maitrise de son destin.  

 

Et pour ceux qui ne l’ont pas compris, il faut lire ce qu’en disentImusnawen que sont Mohammed Arkoun et Mouloud Mammeri dans leurs analyses de deux composantes essentielles de notre culture: l’amazighité et l’Islam. 

Il semble qu’il faille rappeler à certains qu’il n’ya pas que des bandits d’honneur dans notre culture, mais il y a aussi des hommes de culture d’honneur, des hommes de religion d’honneur et des hommes politiques d’honneur. 

 

 Et il y a bien sur, aussi, les autres. 

Ce moment est  important et comme tel il nous force à nous dépasser. 

 

Nous devons être capables de donner le meilleur de nous-mêmes, non dans des actes faussement héroïques et spectaculaires, mais dans la discipline que nous saurons nous imposer. Une discipline qui nous forcera à nous dépasser quotidiennement pour construire, construire, construire… 

Là où certains voudraient que l’on participe à leur œuvre de destruction de ce bien, l’Algérie, dont l’Histoire et les générations futures témoigneront combien nous avons œuvré à la préservation. 

 

Mais revenons à ce moment précis dont il est important de prendre la juste mesure. 

Nous avons tous pu mesurer le respect que nos compatriotes autant que  nos partenaires étrangers portent à notre parti. 

Ce respect, nous avons le devoir de le faire fructifier en nous investissant dans la construction des institutions capables, à partir du parti, d’aller à la rencontre des Algériennes et des Algériens qui partagent nos valeurs de démocratie, de liberté et d’engagement citoyen. 

J’ai à cet effet, et après discussion avec la direction du parti, chargé cette dernière de prendre un certain nombre de mesures allant dans le sens de la mise en place des outils qui ont pour double mission d’accélérer le processus d’ouverture sur la société et d’amorcer le processus d’évaluation. 

Nous avons déterminé quatre chantiers à ouvrir en priorité : 

Les jeunes, les travailleurs, les femmes ainsi qu’une feuille de route d’étape de restructuration du parti. 

J’attends de tous les militants et d’abord des membres du conseil national de se concentrer sur l’essentiel. C’est ce qui doit nous réunir aujourd’hui. 

Je souhaite plein succès à vos travaux

 

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23 décembre 2010 4 23 /12 /décembre /2010 18:34

images1-copie-1.jpgIl y aura un quart de siècle, en avril 1955, qu'une conférence groupant 29 Etats indépendants, 23 asiatiques et 6 africains se réunissait à Bandung en Indonésie, à l'invitation de cinq chefs d'Etats dont Sukarno, Nerhu, et UNu respectivement président de l'Indonésie, de l'Inde et de la Birmanie. Ces derniers sont décédés depuis.

Il en est de même de Nasser et de Zhou Enlai. Le premier faisait à Bandung son premier grand périple, sa première grande expérience diplomatique, Zhou Enlai allait permettre à la chine à cette occasion de sortir de l'isolement et de jouer un rôle important sur la scène internationale. Rappelons que l'URSS n'avait pu faire valoir sa qualité de puissance asiatique pour participer à la Conférence de Bandung.

On a dit de cette conférence qu'elle fût un sommet de l'Histoire, la première réunion des états généraux du monde, le congrès de pays prolétaires. Nul doute que les peuples d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine étaient condamnés par l'impérialisme colonial et postcolonial à l'oubli historique. Bandung ne fût pas qu’un commencement de l'Histoire, ce fût l'acte de naissance du avant la lettre porté par les idéaux libérateurs des droits de l'homme et la volonté de démocratiser les structures et les institutions nationales et internationales dans tous les domaines économiques, politiques et culturels.

Voici trois des dix principes proclamés par la conférence:     

     * Respect des droits de l'homme fondamentaux en conformité avec les buts et les principes de la Charte des Nations Unies;

     * Reconnaissance de l'égalité de toutes les races et l'égalité de toutes les nations, petits et grandes;

     * a) Refus de recourir à des arrangements de la défense collectives destinés à servir les intérêts particuliers des grandes puissances quelles qu'elles soient;

       b) Refus par une puissance quelle qu'elle soit d'exercer une pression sur une autre.

Il n'est pas inutile de rappeler ce paragraphe de la déclaration de Bandung intitulé: "Droit de l'homme et l'autodétermination: La conférence afro-asiatique déclare appuyer totalement les principes fondamentaux des droits de l'homme tels qu'ils sont définis dans la Charte des Nations Unies et prendre en considération la Déclaration universelle des droits de l'homme comme un but commun vers laquelle doivent tendre tous les peuples et toutes les nations. La conférence déclare appuyer totalement le principe du droit des peuples et des nations à disposer d'eux-mêmes tel qu'il est défini dans la Charte des Nations Unies et prendre en considération les résolutions des Nations Unies sur les droits des peuples et des nations à disposer d'eux-mêmes, qui est la conditions préalable à la jouissance totale de tous les droits fondamentaux de l'homme".

Comme tous les peuples du tiers monde, le peuple algérien engagé depuis six mois auparavant dans sa lutte de libération nationale, a revu en profondeur les vibrations démocratiques de ce message qui fondant son droit à l'autodétermination sur le respect des droits de l'homme non seulement venait de balayer les fictions coloniales qui l'ont dépossédé de sa souveraineté, mais aussi le consacrait comme le véritable destinataire et titulaire du droit à l'autodétermination.

Pour l'humanité en voie de décolonisation, l'accession à l'indépendance et à la souveraineté extérieure fondée sur le droit é l'autodétermination ne devait pas éteindre ce droit, mais au contraire le prolonger et l'approfondir dans le combat  pour l'indépendance économique et l'instauration d'un nouvel ordre mondial de plus en plus juste, d'où les guerres, la faim, l'ignorance, le racisme et la peur seraient extirpés.

La Déclaration de Bandung proclamait implicitement le non-alignement du tiers monde en proclamant le principe que les peuples doivent redevenir et rester maîtres de leurs destins, de leurs richesses matérielles et culturelles et d'abord et avant tout de la paix dans le monde. Le non-alignement tel qu'il répondait aux aspirations des Africains, des Asiatiques et des Latino-Américains est une quête d'un projet total de civilisation d'où les dictatures et les guerres sont évacuées  parce que excluant dans les coeurs comme dans les consciences l'idée que les gouvernements laissent oser disposer des peuples, de leurs richesses, de leur sécurité.

Vingt-cinq ans après Bandung, la plupart des pays colonisés ont accédé à l'indépendance et ont rejoint les conférences des non-alignés, dont la dernière, qui s'est tenue l'automne dernier  à La Havane a réuni près d'une centaine de chefs d'Etats et de gouvernements africains, asiatiques, latino-américain. un pays européen, la Yougoslavie, dont le leader avait prôné‚ inlassablement le neutralisme positif et combattu la politique des blocs hégémoniques comme responsable des malheurs de l'humanité  joue un rôle important au sein des non-alignés.

Bilan négatif

Peut-on dire qu'ainsi élargi géographiquement, le tiers monde non-aligné continue à répondre aux espérances nées de la première conférence afro-asiatique? Le bilan se lit dans la violence et le terrorisme étatiques, sur les cadavres des enfants du Brésil, de Bangui, sur le visage des orphelins du Cambodge, dans les guerres civiles et les conflits étatiques qui sèment à travers les trois continents sous-développés, la mort, la destruction et le désespoir.

On a fini par admettre toutes ces guerres marginales tout en exaltant les mérites de la détente et de l'équilibre de la terreur. On a toléré qu'elles soient récupérées et manipulées par les grandes puissances comme soupapes de surete, champs d'expérimentation ainsi que comme moyen d'étendre leurs zones d'influences. La responsabilité des grandes hégémonies est écrasante dans ces phénomènes de décivilisation, illustrés par la ventes massives d'équipements de guerre au tiers monde.

Mais la responsabilité première pèse sur les régimes de dictatures de droite ou de gauche qui déferlent sur le tiers monde, désengagé par rapport aux idéaux de démocratisation, usurpateurs de l'histoire, ils risquent d'enterrer l'avenir car il n'hésitent pas dans des subterfuges idéologiques à engager leur pays déjà empêtrés dans les structures de dépendances économiques et politiques postcoloniales, dans l'engrenage des dépendances militaires qui appellent la domination étrangère avec son cortège de déstabilisations et de malheurs.

Le non-alignement surgi des droits de l'homme et du droit des peuples à disposer de leur destin, de leur richesses et de leurs projets de civilisation, n'a pas d'autre choix que le retour aux sources si l'on veut que nos enfants qui atteindront dans le tiers monde, en l'an 2000 60% de la population mondiale, soient de véritables héritiers de l'avenir et les artisans d'un monde libéré du besoin et de la peur.

Peut-on espérer alors la convocation d'un Bandung des droits de l'homme.

 Hocine Ait-Ahmed
24h, le 23/01/1980

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23 novembre 2010 2 23 /11 /novembre /2010 22:43

Clermont-Ferrand, le 23 novembre 2002

 

Mesdames, Messieurs,

C'est toujours un honneur de prendre la parole devant une assemblée comme la vôtre.
Mais cet honneur, aussi grand soit-il, se double d'une charge terrible. Il est en effet terriblement pesant de prendre la parole pour parler de millions de femmes et d'hommes écrasés par la dictature, l'extrême pauvreté et la guerre et qui n'arrivent pas à trouver une écoute à la mesure de leurs souffrances.
Prendre la parole en ces temps très durs s'accompagne pour le militant que je suis depuis plusieurs décennies d'une exigence de vérité.
Cette vérité pour ne pas rimer avec vanité se doit de le faire avec dureté. Mais aussi grand que puisse être l'inconfort provoqué par cette dureté, il demeure dérisoire face aux malheurs qui frappent une partie conséquente de notre humanité.

Il y a cinquante ans, quand je prenais la parole dans des forums internationaux pour porter la demande d'indépendance de millions d'Algériennes et d' Algériens en révolte contre l'intolérable persécution coloniale, cette prise de parole m'apparaissait comme une balise certaine sur le chemin de la liberté.
Ce fut indéniablement le cas, mais au prix de tant de sacrifices.
Aujourd'hui, face à l'inversion des principes, à la perversion des idéaux démocratiques et aux aveuglements politiques, devant la multiplication des abdications devant la raison d'Etat avec ses logiques de guerre et de prédation, que de militants au Nord et au Sud dévoués à la globalisation des droits la personne humaine, toutes catégories confondues, s'interrogent. Bien que déterminés à porter l'exigence de liberté et de justice de millions de gens éreintés par l'exclusion, la dictature et la terreur , les démocrates sincères et conséquents interrogent , aujourd'hui , la parole politique elle-même.
En d'autres termes, la question lancinante qui se pose à eux est la suivante :
Ø Que manque-t-il à la parole politique pacifique qui l'empêche aujourd'hui d'être le vecteur de l'espoir face au désastre?
Car, n'en doutons point, le désastre, faute d'avoir été prévenu est bien là.
Cette question n'est pas destinée à tester les capacités rhétoriques d'une classe de lycéens. Encore que je sois persuadé que beaucoup d'entre vous gagneraient à entendre ce que les jeunes générations auraient à développer autour de ce propos.
Mais la question de l'inefficacité de la parole politique pacifique coule d'elle-même par tous les interstices d'un siècle qui n'a pas su tenir ses promesses…
Faut-il absolument rappeler le nombre effarant d'enfants, de femmes et d'hommes qui meurent quotidiennement de faim, de maladie ou massacrés faute d'avoir pesé dans l'élaboration des politiques qui leur sont imposées ?
Force est de constater que dans bien des pays du Sud les indépendances ont été confisquées par des régimes qui leur doivent tout mais qui les ont vidées de leur sens. Mon pays n'est pas en reste dans cette dérive de la décolonisation, bien au contraire, puisque le détournement y a porté sur la raison d'être même de l'Etat algérien, à savoir le droit du peuple algérien à l'autodétermination , un droit inaliénable sacré et si cher payé.
Force est également de constater qu'au Nord, des systèmes politiques qui doivent tout à la liberté et à la démocratie ont aidé à les étouffer à chaque fois que les intérêts des plus puissants d'entre eux le commandait.

" L'habitude du désespoir qui est pire que le désespoir ". Albert Camus

Cette rencontre entre l'incurie des uns et les calculs des autres est ce qui dessine l'actuelle impuissance de la parole politique devant " l'habitude du désespoir qui est pire que le désespoir " - selon le mot de Camus - parce elle est à la fois la cause et l'effet du déchaînement des intégrismes de droite et de gauche , des extrémismes et des logiques de guerre.
Ce qui manque à la parole politique aujourd'hui est tout simplement d'être vraie. C'est probablement le cas depuis longtemps déjà mais c'est aujourd'hui que des dizaines de milliers d'hommes et de femmes en prennent massivement et brutalement conscience.
Pour les plus jeunes d'entre eux, comme ces lycéens qui sur tous les continents et même si on ne les y invite pas dissertent sur la question de l'impuissance politique, une partie est déjà acquise à la violence sous toutes ses formes. Une autre partie pense que l'on peut redonner à la politique son efficacité si on l'inscrit ailleurs que dans la fiction l'illusion et le mensonge.
Et quelle plus grosse mystification peut leur jeter à la figure la politique que celui qui s'impose partout aujourd'hui sous les traits de la guerre dite préventive, alors que la prévention appartient en propre à la politique et que la guerre est l'expression de son échec.
Et si on ne devait parler que de l'Algérie pourrait-on taire l'odieux scandale des 200'000 morts, des milliers de disparus, des centaines de milliers de veuves et d'orphelins, des millions de personnes déplacées durant les dix dernières années dont le seul tort est d'avoir pesé moins lourd que le pétrole et les généraux qui en contrôlent l'accès ?
Le plus révoltant dans ce renouvellement cyclique du sacrifice des peuples du Sud aux calculs et aux intérêts égoïstes des stratèges du Nord, est le refus méthodique et constant d'entendre les propositions politiques destinées à éviter les désastres à venir.
Faut-il absolument rappeler les incessantes demandes de condamnation des violations massives et systématiques des droits de l'homme, les trucages électoraux ou la pressante exigence d'une commission internationale d'enquête sur les massacres de civils ?
Faut-il rappeler la plate-forme de Rome et les perspectives de paix et de démocratie qu'elle ouvrait mais qui n'a pas pesé longtemps et surtout pas davantage que les cris des suppliciés sur les politiques adoptées à l'égard de l'Algérie.
Dernièrement encore, un projet de résolution sur les droits de l'homme dans le cadre des accords d'association entre l'Algérie et l'Union Européenne a été édulcoré à l'extrême par des parlementaires européens de gauche et de droite qui n'ont pourtant que le mot Démocratie à la bouche.
Si les hommes ne sont pas toujours responsables de leurs échecs, ils sont néanmoins comptables des batailles qu'ils n'ont pas menées.
L'effacement du politique devant le militaire est probablement ce qui a le plus caractérisé cette dernière décennie.
Non seulement en Algérie où nous payons le prix fort en termes de vies humaines de dislocation sociale mais également à travers les quatre points cardinaux de notre planète, où le devoir international d'assistance à peuples en danger, continue de fonctionner à géométrie variable, et en tout cas à doses homéopathiques , soustrayant de fait des pays comme l'Algérie, la Birmanie, la Palestine, l'Afrique centrale, la Tchétchénie, la Colombie et l'Iraq, à l'empire du droit international et des traditions de solidarité sans frontières qui constituent véritable socle de notre civilisation .
Je vous remercie .

Hocine Ait-Ahmed

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29 octobre 2010 5 29 /10 /octobre /2010 20:46

La Rhodésie, l'état blanc d'Afrique, entrée en rébellion contre la communauté internationale depuis sa sécession du 19 novembre 1965, n'a pas survécu au verdict des urnes. Débaptisée au nom du businessman et conquistador Cecil Rhodes, elle est devenue le Zimbabwe, ce qui veut dire en langue de shona "grand édifice de pierre", une référence aux ruines colossales, vestiges de l'une des plus brillantes civilisation africaines.

Significatif aussi cette double recherche d'identité et de solidarité, le fait que l'indépendance officielle du Zimbabwe sera proclamé‚ le 18 avril prochain, date anniversaire - 25e - de l'ouverture de la conférence de Bandung.

L'émergence de ce cinquantième état africain revêt une portée considérable pour l'humanité africaine en lutte pour ces droits civils politiques, économiques et culturels.

Le raz-de-marée patriotique du 27, 28 et 29 février dernier est d'abord une victoire des opprimés auxquels jusque là les oppresseurs n'avaient pas laissé d'autre choix pour défendre leur dignité et promouvoir leur avenir que de prendre les armes.

Il s'agit d'abord du triomphe du principe de l'autodétermination au sens de l'accession d'un nouvelle état à la souveraineté intérieure et internationale. Ainsi s'est effondrée la logique ultra du bunker, qui avait enfermé les Blancs dans un univers clos manichéiste et répressif.

"Tant que je serai vivant, disait Ian Smith, il n'y aura pas de gouvernement de la majorité,...ni même tant que mon fils serait vivant. Les droits de l'homme ne sont pas faits pour les Noirs qui sont ou trop contents d'être gouvernés par les blancs, ou trop bêtes pour se gouverner eux-même".

En dépit d'un climat de provocation policières et de détentions arbitraires dénoncées par Amnesty International, les deux mouvements de libération, le ZANU de R.Mugabe et le ZAPU de J.N'komo ont accepté l'épreuve du suffrage universel et gagné le pari de confiance de leurs peuples. Ils totalisent 86% des votes des Africains, soit sur 80 sièges réservés à ces derniers 57 sont remportés par Mugab‚ et 20 par N'komo. Le débâcle de l'évêque A.Muzorewa, le dernier premier ministre par la grâce de Prétoria, qui doit se contenter de 3 sièges, 8% des suffrages ( y compris les voix des 25.000 forces auxiliaires) en dépit des sommes fabuleuses dépensées pour sa campagne à l'américaine constitue une leçon à l'échelle de l'Afrique austral: les ventriloques de la "majorité silencieuse" en ont eu pour leur frais, ils placent en mauvaise posture leur homologues actuels ou potentiels de Namibie et d'Afrique du Sud.

La "Valise ou le cercueil"

La "valise ou le cercueil" cette alternative obsessionnelle, les blancs du Zimbabwe n'auront pas à s'y enfermer. Plus que les mesures et engagements pris par Mugabe, le premier ministre, c'est l'attitude et le comportement des citoyens noirs qui garantiront la paix, l'unité‚ et la concorde nationale. Il n'y a pas eu un seul acte de vengeance.

La grande peur des blancs ne peut plus justifier par la peur des Noirs, les droits de l'homme sont pour tous les hommes. Ce message qui répercute l'appel de Bandung ne manquera pas de catalyser les espérances dans les ghettos noirs d'Afrique du Sud et le maquis de Namibie. Si les "Be-hards", les ultras, estiment avoir perdu avec la Rhodésie la dernière frontière sure, par contre les courants libéraux en travail en Afrique australe pourraient grâce à l'exemple zimbabwéen envisager une notion plus humaine, plus durable donc plus intelligente de la sécurité.

En définitive, le droit des peuples de Namibie et d'Afrique sous-apartheid à disposer d'eux-mêmes dépendra de la lutte de ces peuples eux-mêmes, comme l'ont démontré les Zimbabwéens, ainsi que d'un soutien international de plus en plus direct.

Après plus de sept ans d'une guerre meurtrière et ruineuse, les peuples du Zimbabwe ont besoin de paix pour maîtriser leur droits à l'autodétermination en tant que processus de démocratisation politique, économique et culturelle. Ils ont choisie leurs dirigeants en toute souveraineté et c'est en toute souveraineté, c'est-à-dire par l'exercice des libertés publiques syndicales, linguistiques, associatives qu'ils doivent élaborer les orientations et les institutions du nouvel état.

Certes, celui-ci doit parer au plus pressé: nourrir, abriter et soigner une population broyée par l'exode rural, le chômage et la sous-alimentation, tout en gardant d'en faire des "assistés livrés à l'assistance publique nationale et internationale".

La misère

Mais pour pragmatique que puissent être les tâches de développements économiques, elles ne peuvent éluder les problèmes posés par la misère de la majorité‚ des paysans: sans prendre l'allure de règlements de comptes racistes ou démagogiques, la transformation de l'ordre rural s'inscrit dans les perspectives de démocratisations économiques.

La révolution se prouve en marchant et le Zimbabwe dispose d'atout considérable pour faire tourner son économie au lieu de recourir par démagogie au nivellement par le bas ; une agriculture et de l’énergie hydroélectrique notamment presque autosuffisantes, des richesses minières, diamants, étain, chrome, or, etc, des industries de transformation capables de satisfaire la demande intérieure en bien de consommation, des petits et moyens cadres ruraux forgés par les luttes et aptes aux tâches de développement local et enfin l'expérience des échecs économiques des pays frères "mal partis". Le défi qui confronte un leadership porté au pouvoir par l'adhésion véritable des citoyens, à la faveur de choix démocratiques réels est de promouvoir les droits de l'homme économiques et sociaux, tout en consolidant les fondements de la démocratie politique.

C'est peut-être une chance pour le Zimbabwe et l'Afrique que Mugabe soit élue à 67% et non à 99% des suffrages et qu'il appartient à l'ethnie shona, politiquement la plus consciente et numériquement la plus nombreuse, ce qui va lui permettre de résoudre sans hargne et son complexe le problème de l'intégration national que les gouvernements africains préfèrent en général nier dans une nouvelle dialectique de bunker du colonialisme intérieur et dans un engrenage répressif qui conduit au génocide et à l'ethnocide.

 Hocine Ait-Ahmed
1980

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