
Au grand dam de la démocratie algérienne, la presse nationale, à l’instar d’El Watan, continue à entretenir le quiproquo sur la division du champ politique entre démocrates et islamistes. Voilà donc à quoi elle réduit le champ politique aussi large que les sensibilités traversant dans la société.
Or, ceux qui sont qualifiés de démocrates ne le sont pas forcément dans les faits et ceux qui sont considérés islamistes –donc non-démocrates selon cette presse –sont respectueux des valeurs démocratiques. Il suffit, pour cela, d’écouter les déclarations des responsables de Rachad. À moins qu’ils cachent leur jeu. De même, cette bipolarité est également entretenue par le courant éradicateur qui s’est manifesté, à la place de la République, fin juin 2020.
Heureusement, les réseaux sociaux offrent l’opportunité de débattre sereinement de tous ces sujets. Bien qu’il y ait des excès, force est de reconnaître que le débat échappe au paradigme dans lequel la presse tente de l’enfermer. Ainsi, dans un débat que Lahouari Addi a accordé à un jeune activiste du hirak, le professeur a répondu clairement aux interrogations qui reviennent, avec acuité, dans les récentes polémiques.
À la question de savoir s’il fallait avoir peur des divisions idéologiques au sein du hirak, la réponse de Lahouari Addi est sans équivoque. « Si le débat a pour finalité de s’exclure les uns et les autres, le hirak en sortirait affaibli. Si, par contre, il s’agit d’ouvrir le débat pour dégager un minimum républicain acceptable pour les uns et les autres, ce serait bénéfique », dit-il. Est-ce que les éradicateurs sont dans la logique de ces deux hypothèses ? Ce n’est pas sûr.
Dans le fond, tout le monde sait qu’en Algérie, depuis le 22 février 2019, il y avait une démarche consensuelle, au sein de toutes les sensibilités nationales pour demander le départ du système et la refondation d’une nouvelle République sur les bases saines. Les mêmes slogans, dans les 48 wilayas, sont repris tel un seul homme. D’où la tentative du régime qui accuse le hirak d’être téléguide par une main invisible.
Et pourtant, pour des accusations moins importantes, le régime a réussi, dans un passé par si lointain, à déstabiliser n’importe quel détracteur. Hélas, cette fois-ci, aucune recette, aucune accusation et aucune division ne sont parvenues à ébranler le hirak. La raison est simple : la gestion chaotique des affaires du pays, depuis 1962, était telle que les Algériens ne voulaient accorder aucune circonstance atténuante au régime. C’est la raison pour laquelle les Algériens, dans leurs différentes sensibilités, se sont regroupés au sein du hirak pour exiger le départ du système.
Malheureusement, la fissure vient de là où on l’attend le moins. Après avoir fait un bout de chemin avec leurs concitoyens –le hirak est le rassemblement de tous les citoyens –, certaines voix tentent de semer la zizanie. En voulant exclure une partie de nos concitoyens dans la future République, ils ne font qu’exécuter, de façon involontaire peut-être, le plan du régime qui consiste à diviser pour mieux régner. Pour le moment, cette agitation se passe loin des terrains de la lutte. Car, qu’on le veuille ou non, c’est à nos concitoyens sur place, en Algérie, que revient le dernier mot. L’émigration joue certes un rôle, mais l’Intérieur doit primer. Car, si victoire il y a, c’est, avant tout, celle de ceux qui ont fait le choix de résister et de vivre sur place.