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9 août 2020 7 09 /08 /août /2020 11:32

Même si le régime tente de faire passer le procès de Khaled Drareni pour une affaire banale, tout le monde sait que l’affaire est politique. Bien qu’il soit arrêté en compagnie de deux autres animateurs du hirak, en l’occurrence Samir Belarbi et Slimane Hamitouche, le maintien en détention provisoire du journaliste confère à son affaire un autre cachet.

En effet, que le régime le veuille ou non, ce type de chantage n’existe pas dans un État de droit. Dans les pays qui se respectent, les procédures judiciaires sont bien encadrées. Hélas, en Algérie, la justice du régime tient compte des paramètres qui échappent au droit. Ainsi, sans minimiser le rôle des deux autres militants, le cas de Khaled Drareni démontre tout l’acharnement du régime contre l’idée même de la presse libre.

Quel est son tort ? Rapporter fidèlement les mots d’ordre du hirak. Cela ne plait pas aux décideurs. Ils préfèrent plutôt un journalisme dithyrambique. En tout cas, en punissant Khaled Drareni, le message du régime est un peu plus clair. À en croire Lahouari Addi, le message du régime aux journalistes est le suivant : « je n’ai pas le courage d’assumer la censure de la presse, mais si vous ne vous autocensurez pas, vous serez poursuivis pour une  incitation à la violence, atteinte à la sûreté de l’État, intelligence avec l’étranger », écrit-il sur sa page facebook.

Bien que la révolution du sourire ait libéré la parole, le régime ne digère pas la liberté de ton. Et pourtant, les médias dans leur ensemble sont en accord avec la politique du régime. Ainsi, malgré le vent de la liberté, il n’existe que quelques journalistes qui refusent de courber l’échine.

Dans toutes les manifestations, ces justes ne font que relater la vérité. Contrairement à la vile presse qui vit dans le mensonge – certains sont allés jusqu’à présenter la marche du 5 juillet 2020 à Paris comme un soutien de la diaspora à Tebboune –, Khaled Drareni n’a fait que rendre au journalisme sa lettre de noblesse, où sa mission consiste avant tout à rapporter les faits avec fidélité.

Hélas, dans les régimes qui n’émanent pas de la volonté populaire, la vérité n’est pas bonne à dire. Pourquoi le régime algérien ne supprime pas carrément la liberté de la presse ? Pour des raisons stratégiques, il a besoin de plaire aux puissances occidentales.  D’ailleurs, dans toutes ses sorties médiatiques, Tebboune parle de la liberté de la presse en arguant que plus de 8000 journalistes travaillent sans être inquiétés.

Or, cette grande majorité de la presse est anti hirak et défend systématiquement les positions du régime. La question qui se pose est la suivante : comment se fait-il qu’un régime défendu par la grande majorité des journalistes ait besoin d’emprisonner le seul journaliste qui ne se conforme pas à la corporation ? La réalité, c’est qu’en rapportant les mots d’ordre du hirak,  la voix de Drareni pèse plus que tous les médias du régime. D’ailleurs, les chiffres officiels du régime lors de la dernière élection montrent que six Algériens sur dix ne soutiennent pas le régime.

Enfin, dans deux jours, on connaîtra la décision du tribunal Sidi Mhamed. Tout porte à croire que le jugement sera sévère. En tout cas, à travers cette décision, comme le décrit si bien Lahouari Addi, le régime indiquera « dans quelle direction les décideurs veulent aller.» Cela dit, les Algériens doivent aussi avoir leur mot. Car, leur silence pendant plusieurs décennies a facilité la tâche au régime en vue de dépecer le pays.      

 

     

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4 août 2020 2 04 /08 /août /2020 20:04

Si l’arrestation de Moncef Aït Kaci et Ramdane Rahmouni était incomprise, leur libération susciterait la même indignation. Non que les citoyens ne soient pas heureux de la fin de leur cauchemar, mais ils sont consternés par l’attitude de la justice du régime. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que s’il manque un seul indice pour prouver que la justice n’obéit pas au droit, cet épisode en est la preuve irréfutable.

Cela dit, pour un observateur averti, le système, instauré depuis 1962, a toujours fonctionné de cette manière. Dans un pays où la séparation des pouvoirs est une chimère, le pouvoir judiciaire n’a aucune chance de s’émanciper. C’est la raison pour laquelle les deux journalistes ont été libérés moins de 24 heures après leur incarcération. « Et leur libération a été ordonnée, sans même passer par le juge d’instruction », écrit Youcef Rezzoug, ancien journaliste.

Or, si cette gestion stalinienne pouvait se pratiquer en silence dans les années 1960, il n’en est pas de même à l’ère des réseaux sociaux où tout se sait. En d’autres termes, bien que le peuple algérien suive une évolution naturelle – celle que suivent tous les peuples –, le régime est hélas prisonnier de son passé. En s’accrochant à ces pratiques révolues, il veut figer la société. Ainsi, en dominant tous les autres pouvoirs et toutes les institutions, le pouvoir exécutif n’est pas prêt de faire son mea culpa ni de rectifier le tir.

Pour masquer ses tares, le régime recourt indéfiniment à la théorie du complot. C’est le cas de l’affaire du journaliste libre, Khaled Drarani. En couvrant les manifestations du hirak, il est accusé de menacer l’unité nationale. Ce grief est malheureusement le plus utilisé contre tous les contradicteurs du régime. Et si Moncef Aït Kaci et Ramdane Rahmouni n’étaient pas libérés sous la pression de France 24 et du Quai d'Orsay, ils seraient accusés, eux aussi, d’atteinte à l’unité nationale.

Finalement, à l’examen de ces éléments, il y a une question qui s’impose naturellement : qui est-ce qui a changé depuis l’arrivée de Tebboune aux affaires pour que les Algériens cessent de manifester  après la fin de la pandémie?  Tous les ingrédients sont réunis. En plus, dans le fond, le problème n’est pas la volonté des personnes, mais c’est la nature même du régime qui génère tous ces défauts.

En effet, à partir du moment où Tebboune accepte de gouverner – les Algériens ont leur idée sur la légitimité des gouvernants – sans la rupture avec l’ancien régime, sa gestion ne peut différer de celle de Bouteflika, ni de Zeroual, ni de Chadli, ni de Boumediene et ni de Ben Bella. Or, qu’on le veuille on non, ce système a échoué. Les Algériens ont fait l’amère expérience. Ce qui explique leur détermination à rompre avec ce système. Cette volonté s’exprime dans le slogan : yetnahaw ga3. C’est à partir de là que l’on pourra alors rêver d’une justice libre.   

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2 août 2020 7 02 /08 /août /2020 15:13

Le détournement du rêve algérien a été l’œuvre bien planifiée de quelques marginaux de la révolution algérienne. Et pourtant, en dépit de l’insuffisance des moyens, le courant nationaliste a bâti le projet de la République démocratique, et ce, contre vents et marées. Cela a pris au moins trois décennies, de 1926 à 1954. Bien que la crise de leadership ait miné le parti indépendantiste, en l’occurrence le PPA-MTLD, il n’en reste pas moins que les objectifs fondamentaux ont été poursuivis avec abnégation.

Parmi les authentiques personnalités qui pouvaient donner du sens à la construction du futur État, l’éminent historien Gilbert Meynier retient au moins trois noms. En plus des « deux grandes figures de la Soummam, Abane et Ben Mhidi », il n’omet pas « non plus ce modèle de l’intégrité politique moderne que fut Ben Khedda. »

En tout cas, si la proclamation du 1er novembre 1954 a défini l’objectif de la révolution, le congrès de la Soummam a balisé les contours du futur État. À l’exception du MNA de Messali Hadj, tous les partis algériens ont intégré le front en vue de concrétiser le rêve de tout un peuple. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’à partir de fin 1956, des preuves « laissent entrevoir les prodromes d’une idéologie moderne », pour reprendre les termes de Gilbert Meynier.

Hélas, le prolongement du conflit a fait émerger des personnalités qui n'avaient, par le passé, aucun engagement ni sens politiques. Ainsi, au moment de la crise opposant le GPRA à l’EMG (état-major général), ce qui séparait Ben Khedda de Boumediene, c’était leur culture politique. Pour Gilbert Meynier, Ben Khedda « vivait encore dans le parti –le MTLD –, caressant la chimère qu’un vote majoritaire pourrait régler les choses. Alors qu’il avait en face de lui des gens qui étaient prêts à tout pour prendre le pouvoir et qui le signifièrent bien. »

À partir de là, l’Algérie vit la descente aux enfers. Le régime victorieux de la crise de l’été 1962 s’empare de tout le pays. De coup de force en coup de force, le régime façonne les institutions –alors qu’elles doivent être l’émanation du peuple –de sorte à maintenir sa mainmise sur le pays ad vitam ad aeternam. À l’exception des élections de 1990 et 1991, toutes les autres ont été préfabriquées à l’image de celles d’avril 1948, préparées par le gouverneur Naegelen. Et tous les gouvernements successifs ont un point commun : empêcher le peuple d’avoir un regard sur ses propres affaires.

Enfin, cette suprématie a duré de 1962 à 2019. Profitant de l’erreur stratégique du régime qui voulait reconduire un homme cliniquement mort à la tête de l’État, le peuple algérien refuse cette fatalité. Depuis cette date, il se mobilise pour exiger la restitution du pouvoir à son propriétaire, le peuple algérien. Les slogans repris dans les manifestations renseignent sur la colère de la grande majorité du peuple algérien. Car, qu’on le veuille ou non, le régime a fidélisé une clientèle pouvant atteindre les 20% de la population. Bruyante, elle a fait croire pendant longtemps qu’elle était le peuple.

 En effet, en l’absence du peuple, c’est elle qui a occupé le terrain pendant plusieurs décennies. En un mot, le peuple algérien a payé le prix de son slogan en 1962 : « sept ans, ça suffit. » En refusant de prendre parti, les vainqueurs de la crise de l’été 1962 l’ont invité à rentrer à la maison et à se taire à jamais. C’est cette erreur qu’il ne faudrait pas refaire en 2020.   

 

 

 

 

   

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30 juillet 2020 4 30 /07 /juillet /2020 19:44

La reprise du phénomène de harraga est avant tout un signe de désespoir. Bien que certaines personnes essaient de trouver des arguments pour le réduire à la simple recherche d’une vie meilleure, il n’en reste pas moins que l’absence de perspective dans le pays pousse les jeunes à affronter la mort afin de s’extirper du marasme qu’ils vivent.

Bien entendu, ce marasme, encore une fois, n’est pas lié à la crise économique endémique. Et même lorsque la situation financière du pays était favorable, le phénomène de harraga ne s’est pas estompé. Cela dit, quand les caisses de l’État sont pleines, le régime se les partage entre les membres du clan. Même si les partisans de « la nouvelle Algérie » font semblant de ne rien savoir à l’époque, ils étaient autant responsables que ceux qui sont actuellement en prison pour les crimes économiques.

Mais, comme le dit le proverbe « à quelques choses malheur est bon », cette gestion chaotique du pays a permis aux Algériens de retrouver leur cohésion, au sein du hirak, en faisant échec au système Bouteflika de se maintenir et ensuite en menant un combat sans concession contre le reste de son clan. Cette unité d’action a créé un vent d’espoir jamais vu depuis l’indépendance.

Comment peut-on mesurer cet espoir ? De février 2019 à juillet 2020, l’Algérie n’enregistre plus de départ clandestin de ses enfants dans des embarcations de fortune. Le hirak a donc bien suscité l’espoir de rester et de construire le pays.

Hélas, la crise sanitaire a poussé les citoyens à suspendre le hirak. Profitant de cette pause, le régime se refait une santé sécuritaire. Combien de jeunes sont emprisonnés depuis le début de la pandémie pour des publications sur les réseaux sociaux ? Chaque jour apporte son lot de convocations, d’arrestations, etc.

De la même manière, la gestion approximative de la crise sanitaire n’est pas de nature à apaiser les esprits. En effet, au discours culpabilisateur du régime, le citoyen est désarçonné. Comment le citoyen peut-il rester confiné si les autorités ne mettent pas à sa disposition le minimum vital à sa survie ? En tout cas, le citoyen n’est pas bête comme le prétendent les dirigeants. Il sait que le confinement en Europe a cassé la chaine de transmission du virus, car les gouvernements ont garanti les besoins essentiels de leurs concitoyens.

Pour conclure, il va de soi que la crise sanitaire ne peut pas expliquer à elle seule la reprise du phénomène de harraga. D’autres pays vivent la même crise. En Algérie, le plus grand drame est la crise de confiance. Il s’agit de la confiance du peuple en ses capacités de changer les choses. Ce qui explique l’arrêt de ce phénomène depuis février 2019.

En reprenant ses forces grâce à la crise sanitaire, le régime parait assez fort pour empêcher toute velléité de changement. En ce sens, les pessimistes n’ont pas tort. Si le régime reprend le contrôle de la rue, le pays sera plongé dans une ère semblable à celle de Bouteflika ou carrément la poursuite pure et simple du règne de Bouteflika. Ce qui pousserait certains à jeter l’éponge. Mais, en voulant partir, ils mettent leur vie en danger sans être sûrs de retrouver la sérénité ailleurs.  

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27 juillet 2020 1 27 /07 /juillet /2020 21:14

Décidément, les polémiques sur le dos du hirak ne sont pas près de s’arrêter. Après les éradicateurs de la place de la République qui ont pourri l’atmosphère depuis fin juin 2020, c’est désormais autour de Zitout de remettre une couche. Et pourtant, jusqu’à son dernier appel –par devoir d’honnêteté, il faut rappeler qu’il précise que de cette violence va intervenir en cas de risque de scission du pays –, force est de reconnaître que ces discours étaient jusque-là en accord avec l’esprit pacifique du hirak.

Bien entendu, tous les appels à la violence sont condamnables sans réserve. Le pays a assez sacrifié le sang de ses enfants sur l’autel des luttes idéologiques. Cela dit, les premiers à s’en prendre violemment à Zitout n’ont pas fait autant en juin 2018 quand Ferhat Mehenni a appelé à former les groupes d’autodéfense en Kabylie. Pour un démocrate sérieux, il ne devrait pas y avoir de double discours.

Toutefois, dans cette condamnation sans réserve de l’appel de Zitout, il n’est pas honnête d’exploiter cette faute pour servir des intérêts étroits. Tout le monde peut comprendre que Zitout s’adresse aux partisans de Ferhat Mehenni et non pas à tous les Kabyles. Or, le site du MAK veut brouiller les cartes. Pour les rédacteurs de la réplique à Zitout, ils disent que des vidéos « dévoilent toutes les intentions prévisibles de Rachad et ses cadres de vouloir recourir aux armes contre leurs détracteurs qui sont en majorité écrasante des Kabyles ».

Ceci est évidemment faux. Tout d’abord, c’est Zitout qui menace et non pas les militants de Rachad. C’est valable en 2018 quand Ferhat Mehenni a appelé à armer ses partisans. On ne peut pas incomber cette menace à tous les militants du MAK. La preuve : une partie a quitté le navire et a même créé une autre organisation.

Cependant, les Algériens ont dépassé ce stade de barbarie. Ils ont surtout d’autres préoccupations. Et ce n’est pas un hasard que ce genre d’appel soit émis à l’étranger. Malgré les injustices, les citoyens vivant sur place ont un autre esprit de la lutte. En effet, depuis février 2019, toutes les manifestations sont un exemple de civisme, de pacifisme et de maturité du peuple algérien.

À vrai dire, le seul mal de l’Algérie, c’est son régime politique. La démocratisation effective des institutions permettra surement d’éviter ce genre d’appel à la violence. Car, une Algérie apaisée est celle qui dialogue idée contre idée et non une Algérie qui fait de la surenchère de la violence.

Pour paraître un rempart incritiquable, l’armée ne devrait pas participer, de façon directe ou indirecte, à la compétition politique. C’est la raison pour laquelle le hirak réclame un État civil et non un État militaire. Ainsi, si elle est au-dessus de ces manœuvres politiques, elle mettra en échec toutes ces tentatives de violence et de scission sans qu’elle soit accusée d’être une partie de l’équation politique.

 

 

 

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25 juillet 2020 6 25 /07 /juillet /2020 20:32

Pour la quasi-totalité des personnes qui sortaient, chaque mardi et chaque vendredi avant l’avènement de la pandémie, leur acte était plutôt citoyen. Le pays allant à vau-l'eau, ils ont bravé toutes les peurs en vue d’accomplir leur devoir national.

Naturellement, tous les courants politiques se côtoyaient sans aucune animosité. À vrai dire, les Algériens sont conscients que leurs divisions étaient jusque-là leur talon d’Achille. C’est la raison pour laquelle les citoyens sortent en tant que citoyen et non en tant que représentant d’un courant politique.

Cette stratégie n’a pas évidemment que des avantages. Bien que le régime ait du mal à récupérer les têtes d’affiche, en étant l’addition de tous les courants, le hirak ne peut pas non plus porter un projet politique cohérent. Dans ce cas, est-ce qu’il est possible que le hirak débatte sur des questions idéologiques alors que son essence était à la base le dépassement de ces questions ?

Du coup, le mouvement populaire se focalise sur le changement de système et non la définition du nouveau régime. Autrement dit, l’urgence du hirak est de reprendre les rênes du pays, détenues illégalement par un groupe de personnes travaillant pour leurs propres intérêts. La divulgation des détournements des deniers publics renseigne sur l’ampleur du désastre de la corruption. Cela dit, les affaires médiatisées ne représentent que la partie visible de l’iceberg.

Donc, qu’on le veuille ou non, le hirak est le seul espoir de sauver le pays. Car, jusque-là, toutes les oppositions, respectables les unes que les autres, ont été mises en échec par le pouvoir. Et s’il n’arrive pas encore à déstabiliser le hirak, c’est parce que les animateurs du mouvement se présentent comme des citoyens lambda. Peu importe l’aura du militant, il se présente –et c’est tout à leur honneur –comme des simples éléments du hirak. Pour vérifier ça, il suffit de revoir les déclarations de Boumala, Belarbi, Tabbou, Bouraoui, etc.

Malgré les insuffisances, cette stratégie constitue la principale force du hirak. En exigeant le départ des responsables de la crise, la rue algérienne ne veut pas offrir une énième chance au régime pour qu’il se pérennise. Car, les citoyens savent pertinemment que si le régime identifie les responsables, ce sera peut être fini de cette dynamique représentant l’ultime chance de soustraire le pays des mains du même régime, installé par la force en 1962.

Hélas, le régime n’a pas encore dit son dernier mot. Après avoir tenté de diviser les citoyens sur l’emblème culturel, sur les régions, il trouve enfin une faille en remettant sur la place publique les conflits idéologiques. Ce n’est pas gagné pour le moment, car cette manipulation ne touche pas le corps sain du hirak qui se trouve en Algérie. Car, à l’étranger, certaines personnes se réclamant du hirak ne semblent pas se préoccuper par le changement de régime, mais par le triomphe de leur idéologie. Et qui plus est, il ne représente que dalle.            

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23 juillet 2020 4 23 /07 /juillet /2020 21:24

Dans sa récente rencontre avec « les journalistes » algériens, Abdelmadjid Tebboune paraît dans une école où il apprend à des petits gamins gentils et obéissants sa leçon. Pire encore, quand un journaliste acquiesce en hochant la tête à chaque réponse de son interviewé, il discrédite avant tout sa profession. Et pourtant, il y a quinze jours, ces deux lascars auraient pu apprendre leur métier lors de l’interview de Tebboune avec le journaliste de France 24. Malheureusement, quand la pusillanimité prend le dessus sur l’honneur, la formation ou le métier n’y peut rien.

En tout cas, ce que l’on peut retenir dans cet exercice pénible, c’est que le chef de l’État ne compte pas exclure les Algériens de participer à la gestion de leurs affaires. Car, explique-t-il, les réalisations sont faites pour eux et non pas dans l’intérêt du régime. Mais, pour qu’ils aient cette opportunité, il faudrait qu’ils le rejoignent. En d’autres termes, dans le cadre du cap qu’il fixe lui-même. Or, dans les pays qui se respectent, le chef de l’État n’est qu’un salarié du peuple pour une durée où il l’autorise à exercer son mandat. Et quand le peuple n’adhère pas à ce projet, c’est que le chef de l’État ne peut pas se prévaloir de la légitimité de ce même peuple.

Hélas, cette histoire ne remonte pas à 2019. La confusion entre l’État et le pouvoir n’est pas près de connaître son épilogue. En effet, depuis 1962, le pouvoir exécutif a dévoré tous les pouvoirs. Bien qu’une opposition se soit manifestée dès septembre 1962, les usurpateurs du pouvoir ont poursuivi méthodiquement leur œuvre de la spoliation des Algériens de tous leurs droits. À une certaine époque, il était même dangereux d’émettre le moindre avis politique. Pendant 26 ans de règne sans partage du parti unique, le régime n’a jamais cédé la moindre parcelle de liberté. Et quand les jeunes algérois ont payé de leur sang le prix du pluralisme, le régime a réussi la plus grande tromperie de l’histoire.

En fait, quand un pays change de politique, cela doit impliquer forcément le départ de l’équipe qui a échoué. Or, en 1988, malgré l’échec cuisant du régime, il a réussi à convaincre –plutôt à gruger –le peuple algérien qu’il était le mieux placé pour mener les réformes. En maintenant le peuple à l’écart, ces réformes ont donné lieu à une lutte intestine au sommet du pouvoir entre les réformateurs et les conservateurs. La victoire des conservateurs après l’arrêt du processus démocratique a replongé l’Algérie dans une période plus alambiquée d’avant l’ouverture.

Pour relever sa tête, le peuple algérien a attendu 2019 pour renouer avec la contestation organisée. Hélas, les manifestations gigantesques du 22 février 2019, saluées par ailleurs par tous les pays, n’ont pas suffi à provoquer le changement radical du système. Ailleurs, là où le citoyen est respecté, 1/100eme de la mobilisation algérienne aurait donné lieu à des chamboulements profonds.

En Algérie, en actionnant l’article 102 de la constitution –alors que le peuple exige l’application des articles 7 et 8 –, le haut commandement militaire a décidé de sauver le système, et ce, malgré la protestation de plusieurs millions d’Algériens. Cela dit, refusant le marché de dupes, les Algériens ont continué à manifester jusqu’à la mi-mars. Hélas, la crise sanitaire est passée par là. Désormais, le nouveau représentant du régime peut reprendre les mêmes éléments de langage que ses prédécesseurs. Combien de fois on a entendu les chefs de l’État dire aux Algériens : « on travaille pour vous. Celui qui veut être un bon citoyen n’a qu’à venir nous épauler ».

Dans le fond, aucun n’a servi le peuple. Aucun n’a rendu des comptes. D’ailleurs, comment peuvent-ils rendre des comptes quand ils estiment que leur autorité est supérieure à celle du peuple ? Encore une fois, même si l’élection n’est pas entachée d’irrégularités, le premier magistrat du pays n’est qu’un simple citoyen exerçant le mandat que lui a confié le peuple. En étant rémunéré, il doit prouver tous les jours qu’il mérite un tel salaire. Et surtout, il ne doit en aucun cas insinuer qu’il est le maître du pays. Car, le seul maître du pays, c’est celui qui donne le mandat. Et celui qui donne le mandat, c’est le peuple.  

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20 juillet 2020 1 20 /07 /juillet /2020 20:09

Sans vouloir minimiser le rôle de n’importe quel citoyen, il y a une répartition latente des missions dans chaque révolution. Qu’on le veuille ou non, le hirak ne peut pas en déroger. Le cap et les buts du hirak doivent être fixés par ceux qui se battent sur le terrain, c’est-à-dire en Algérie, à travers les 48 wilayas. D’ailleurs, est-ce qu’il devait y avoir un malentendu sur cette question ? Si on ne poursuit pas des objectifs étroits, il ne devra pas y subsister de quiproquo.

À vrai dire, pour qu’il y ait une révolution, il faudrait que le mouvement commence au pays. C’est le cas en 1954 et plus tard en 2019. Pour le cas de la première révolution, la délégation extérieure du FLN n’a été informée de la préparation de la guerre qu’après la réunion des 22 où l’action armée a été tranchée. Et c’est une fois que les cinq zones –futures wilayas historiques – sont déterminées que le conseil de la révolution a intégré les membres de  la délégation extérieure pour former le fameux groupe des 9.

De la même manière, les membres de la fédération de France du FLN ont été systématiquement désignés par l’Intérieur. Bien que la guerre fratricide, entre le FLN et le MNA, ait divisé les Algériens, dans l’ensemble, la communauté algérienne s’est contentée de jouer son rôle, à savoir l’apport financier à la révolution. D’ailleurs, d’après certaines archives, plus de 80% de la trésorerie du GPRA émanait de la diaspora.

Cela dit, le contexte de 1954 n’est pas le même que celui de 2020. Mais, ce rappel historique est nécessaire pour comprendre le sens de l’engagement. Or, depuis la reprise des rassemblements à Paris –est-ce qu’on peut l’appeler hirak ? –, certaines personnes demandent à partir de la place de la République de définir les contours de la nouvelle Algérie sans le vote ni la consultation des 40 millions d’Algériens vivant sur place.

Ainsi, sous prétexte de prévenir le scénario des années 1990, des éradicateurs –ils oublient que leur tendance était responsable également de la tragédie –veulent exclure une partie de nos concitoyens des futures institutions. Pour quelle raison ? Ils les considèrent extrémistes. Mais, au nom de la différence, ils ne condamnent pas le séparatisme, un phénomène plus dangereux à l’unité nationale. Bien évidemment, ils ne peuvent pas désavouer le chef de file des éradicateurs en 1991, en l’occurrence Ferhat Mehenni. Car, ils partagent la même haine.

Enfin, toutes ces manœuvres montrent que certains militants agissent au sein du hirak pour leur propre idéologie. Heureusement, pour l’unité du hirak, cette agitation se passe loin du terrain de la révolution. Pour une raison que l’on ne souhaite pas, si le hirak en Algérie s’arrête, les rassemblements de la place de la République pourront se poursuivre indéfiniment. Donc, le seul et le vrai hirak, c’est celui du pays. Du coup, le seul devoir est de soutenir la révolution du sourire qui affronte le pouvoir, avec courage et au risque de croupir dans ses geôles. Celui qui veut peser dans le choix de la future République n’a qu’à demander le mandat de ces 40 millions d’Algériens.  

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18 juillet 2020 6 18 /07 /juillet /2020 20:48

Quand un représentant du pouvoir préfère que les gens meurent de faim que du coronavirus, cela prouve, si besoin est, que la politique de confinement n’est qu’un leurre. En tout cas, avec cette gestion hasardeuse de la crise sanitaire, il est évident que la pandémie ne va pas s’estomper de sitôt en Algérie si le peuple ne se mobilise pas.

Bien que le chef de l’État se vante d’avoir le meilleur système de santé –on aurait aimé que ce soit vrai –, sur le terrain, le citoyen et le personnel médical sont livrés à eux-mêmes. Cela dit, en aucun cas, le citoyen ne devrait s’en prendre au personnel médical qui mérite tous les respects.

En tout état de cause, la crise sanitaire risque de durer encore plus longtemps. En effet, contrairement à ce qui s’est fait en Europe, en Algérie, il n’y a jamais eu de confinement. Or, pour casser la chaîne de transmission, il n’y a pas de solution magique. Seul le confinement total est capable de stopper cette pandémie de façon drastique. Dans ce cas, le pouvoir exécutif doit subvenir aux besoins du citoyen.

Ainsi, en France, par exemple, les gens ne pouvaient sortir que pour les besoins de première nécessité. Cela avait un coût : le chômage partiel a coûté plusieurs milliards d’euros.  Ou alors, il faut adopter le modèle suédois où l’on cherche l’immunité collective. Dans ce cas, la vie continue sans chamboulement. Mais, en même temps, il faudrait assumer l’augmentation des contaminations.

Or, les autorités n’assument aucun de ces choix. Du coup, la communication officielle donne lieu à des écarts de langage indignes des responsables. C’est le cas notamment du wali de Djelfa qui souhaite voir les citoyens crever de faim que de ce maudit virus. Dans les pays qui se respectent, une telle déclaration provoquerait au moins son éviction sur le champ. Car, un responsable n’a pas pour mission de choisir le type de la mort de ses concitoyens. De même qu’il n’est pas là aussi pour éduquer par le bâton ses concitoyens, comme le fait sinistrement le wali de Sétif.

Quelle est donc l’issue à la crise ? Bien qu’ils soient abandonnés à leur sort, les citoyens ne doivent pas négliger cette maladie. Ces effets sont terribles sur la personne elle-même et sur son entourage. Par conséquent, les recommandations sanitaires sont plus que jamais recommandées. C’est le cas du respect des distanciations physiques ou du port du masque.

En un mot, la maîtrise de la pandémie dépend désormais de l’engagement du citoyen.  D’où la nécessité de réorganiser les marchés où l’on voit les personnes collées les unes aux autres. C’est aussi le maintien de la suspension de toutes les actions politiques dans les places publiques. Et si le régime veut aider cette population à s’en sortir –s’il lui reste encore un peu d’humanisme –, il doit suspendre toutes les mesures de règlements de compte envers les jeunes qui ont pris part au hirak.

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16 juillet 2020 4 16 /07 /juillet /2020 19:30

L’interview d’Abdelmadjid Tebboune au journal l’opinion ne passe pas inaperçue. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle suscite beaucoup de réactions. Sans aucun chauvinisme, on peut aisément dire que face aux médias français, le débat devient par enchantement plus profond. Est-ce que la presse algérienne, dont il loue le mérite –160 titres, d’après ses dires –, ne peut pas accomplir une telle tâche ? En partie oui. Car la presse algérienne ne veut pas non plus s’émanciper. Ce qu’elle ignore en revanche, c’est qu’à force de se dévaloriser par « la chita », dont elle seule a le secret, le régime ne la respecte même pas. Ainsi, lors de ses rencontres avec Tebboune, les représentants de la presse nationale –pour ne pas être méchant –ne font pas honneur à leur profession.

Toutefois, s’il y a une partie de l’interview où l’on peut être d’accord, c’est quand il traite du sujet inhérent à la mémoire. Mais, il faudrait préciser un détail capital : si le régime utilise la mémoire en vue de se pérenniser au pouvoir, il n’en est pas de même de la plupart des Algériens qui sont attachés à la mémoire en signe de reconnaissance à l’œuvre herculéenne de leurs aînés. Du coup, si nos valeureux chouhadas ont accompli leur mission, la question qui se pose véritablement est de savoir à quel niveau ça coinçait pour que notre pays reste dans le sous-développement endémique ?

Contrairement à la ligne de défense du chef de l’État, le mal algérien ne remonte pas à la maladie de Bouteflika. Incontestablement, « l’Algérie a souffert de la maladie de l’ex-président et surtout du gaspillage des gangs qui l’entouraient », pour reprendre son expression, mais le véritable mal a commencé en 1962 quand un groupe d’officiers, basés aux frontières, a décidé de s’emparer du pouvoir et de se substituer à la volonté du peuple. Pour résumer les différentes périodes, il suffit de compter le nombre de constitutions adoptées depuis l’indépendance. Chaque chef de l’État en rédige une à la mesure de ses ambitions. D’ailleurs, si Bouteflika était en bonne santé, au bout du cinquième mandat, l’Algérie serait appelée « République de Bouteflika ».

Cependant, bien que le chef de l’État actuel démente toute velléité de copier le même modèle, il n’en reste pas moins qu’il ne déroge pas, dans les actes, à la même conduite. En effet, de Ben Bella à Tebboune, ce sont les commissions d’experts qui établissent la mouture du texte fondamental. Et pourtant, dans la logique des choses, ce sont les citoyens, à travers leurs représentants légitimes, qui rédigent la constitution. Et si ce même peuple décide d’annuler ladite constitution, il pourra le faire en toute souveraineté. Est-ce que les 13 millions d’Algériens qui sont descendus dans la rue en février 2019, comme le reconnaît Tebboune, ont réussi à le faire ? La réponse est non. À la place des articles 7 et 8 que scandaient les manifestants, Gaid Salah a imposé l’article 102 dont la finalité consistait à sauver le régime et sa constitution de 2016.

En somme, le problème des dirigeants qui ne rendent pas compte à leur peuple, c’est qu’ils peuvent tenir un discours le matin et soutenir l’inverse le soir. Ainsi, la transition qui a été décriée avec autant de véhémence en février 2019, allant jusqu’à traiter ses promoteurs d’agents au service des puissances étrangères, ne l’est plus face au journaliste de l’opinion. « En principe, j’ai été élu pour un seul mandat… C’est une transition qui ne dit pas son nom », dit-il. En d’autres termes, ils sont d'accord pour que toutes les transitions aient lieu à la seule condition que le pouvoir ne soit pas restitué au peuple. Cela se vérifie sur le terrain à travers les arrestations massives des militants du hirak pour des simples publications sur les réseaux sociaux. À vrai dire, les principes démocratiques et le respect des droits de l’homme ne doivent pas être claironnés, mais il est primordial de les appliquer. Sur ce point, les Algériens sont témoins des 7 mois de Tebboune à la tête de l’État.  

  

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  • Il est du devoir de chaque citoyen de s’intéresser à ce qui se passe dans son pays. C'est ce que je fais modestement.
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