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30 mai 2005 1 30 /05 /mai /2005 15:31

images.jpegDans quelques jours, le peuple algérien sera appelé à approuver, par voie référendaire, le projet pour la paix et la réconciliation nationale dont le vendeur du projet n’est autre que le premier magistrat du pays. Sans vouloir se lancer dans les détails de la compagne, où tous les moyens ont été déployés pour arriver à faire passer vaille que vaille la charte, force est de reconnaitre que  les contours ne sont ni clairs ni lisibles.

Par ailleurs, le fait qui épate plus d’un est comment se fait-il que dans un pays où la religion est consacrée dans la constitution comme une constante nationale, le président n’en jette même pas un œil pour en savoir que dit-elle lorsqu’il subsiste un conflit entre deux groupes. Eh bien, une sourate est très claire la dessus : « Et si deux groupes de croyants se combattent, faite la réconciliation entre eux. Si l’un d’eux se rebelle contre l’autre, combattez le groupe qui se rebelle jusqu’à ce qu’il se conforme à l’ordre de Dieu. Puis s’il s’y conforme, réconciliez-les avec justice et soyez équitables car Dieu aime les équitables ». Cependant, ce  qui est répréhensible dans sa démarche ce n’est pas seulement le fait de consulter la religion ou pas, le problème c’est pourquoi a-t-elle été inscrite dans les premiers articles de la constitution s’il n’y aucune volonté manifeste d’en faire appel quand elle propose une issue à la crise.

 

Toutefois, il y a  des tas de cas dans le monde où des pays ont recouru à cette forme de réconciliation. Le mieux pour notre pays est de voir le modèle qui a apporté plus de paix dans le long terme. Il semble que le  cas de l’Afrique du sud soit le plus illustrant. Dans le processus de chercher la vérité, la commission de réconciliation et de vérité a considéré quatre formes de justice :

1) l’opportunité pour la victime de raconter son histoire en public(justice procédurale),

2) l’opportunité pour la victime de recevoir des excuses de la part du coupable(justice restauratrice),

3) le sentiment profond de honte généré par l’aveu public du coupable(justice symbolique),

4) la compensation financières de la victime (justice restitutive).



Toutefois, si le cas de l’Afrique du sud a pu éteindre le feu et solutionner par conséquent un problème vieux de plusieurs décennies, d’autres exemples n’ont pas donné des résultats escomptés à l’instar des pays de l’Amérique latine. Sur ce point l’avocate américaine, Joanne MARINER, est très explicite : « la véritable réconciliation, reconnaissaient aujourd’hui les pays l’ayant adoptée, ne peut être fondée sur l’impunité. Elle nécessite la justice, et pas les amnisties. Elle signifie que les rapports des commissions de vérité doivent être considérés
comme des points de départ et non pas une fin en soi. La réconciliation au sein de la société est un idéal louable. Elle ne doit cependant pas être mal utilisée comme un slogan cynique ou comme un euphémisme pour l’impunité ».

Il est vrai, néanmoins, que chaque être humain est appelé un jour ou l’autre à solliciter le pardon, parfois à l’accorder, et si ce cas de figure n’existe pas, aucune paix ne peut subsister sur la planète. La question qui  demeure par ailleurs posée  est la suivante : qui est habilité à accorder le pardon ? Qui mérité le pardon ? Sous quelles conditions le pardon est-il légitime ? La réponse ne doit souffrir d’aucune équivoque. Le pardon  est un don que seule la victime peut offrir. Pour le philosophe Olivier ABEL « celui qui pardonne doit être celui qui a subi le tort, et nul ne peut usurper cette place ».

Quant à l’amnistie qui se profile à l’horizon, le vendeur du projet doit savoir que celle-ci produirait des effets néfastes notamment sur le plan moral de la victime si la procédure le lésait. A ce propos, le psychiatre argentin BAEZA est arrivé à la conclusion que les patients qu’il traitait étaient affectés par deux types d’agression: les crimes contre l’impunité et l’impunité. BAEZA défend la thèse selon laquelle, avec le temps, la présence de l’impunité devient un mécanisme de trouble psychique capable de provoquer des désordres mentaux au moins aussi graves que ceux produits par la torture. Il qualifie l’impunité d’acte de violence, car il constitue, dit-il, « une décision humaine, une action, un comportement, un acte de déni de la réalité concrète. C’est une agression symbolique qui vient s’ajouter aux crimes commis ».

Cependant, le peuple algérien est libre de choisir entre deux options.  L’une consistant à
rétablir la vérité et avancer petit à petit dans le processus de la paix pour son installation définitive, ou bien, il optera pour une solution de replâtrage qui peut, au contraire, aggraver la situation sécuritaire.

 

Par Ait Benali Boubekeur, Toulouse, le30 mai 2005

 

 

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