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2 août 2020 7 02 /08 /août /2020 15:13

Le détournement du rêve algérien a été l’œuvre bien planifiée de quelques marginaux de la révolution algérienne. Et pourtant, en dépit de l’insuffisance des moyens, le courant nationaliste a bâti le projet de la République démocratique, et ce, contre vents et marées. Cela a pris au moins trois décennies, de 1926 à 1954. Bien que la crise de leadership ait miné le parti indépendantiste, en l’occurrence le PPA-MTLD, il n’en reste pas moins que les objectifs fondamentaux ont été poursuivis avec abnégation.

Parmi les authentiques personnalités qui pouvaient donner du sens à la construction du futur État, l’éminent historien Gilbert Meynier retient au moins trois noms. En plus des « deux grandes figures de la Soummam, Abane et Ben Mhidi », il n’omet pas « non plus ce modèle de l’intégrité politique moderne que fut Ben Khedda. »

En tout cas, si la proclamation du 1er novembre 1954 a défini l’objectif de la révolution, le congrès de la Soummam a balisé les contours du futur État. À l’exception du MNA de Messali Hadj, tous les partis algériens ont intégré le front en vue de concrétiser le rêve de tout un peuple. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’à partir de fin 1956, des preuves « laissent entrevoir les prodromes d’une idéologie moderne », pour reprendre les termes de Gilbert Meynier.

Hélas, le prolongement du conflit a fait émerger des personnalités qui n'avaient, par le passé, aucun engagement ni sens politiques. Ainsi, au moment de la crise opposant le GPRA à l’EMG (état-major général), ce qui séparait Ben Khedda de Boumediene, c’était leur culture politique. Pour Gilbert Meynier, Ben Khedda « vivait encore dans le parti –le MTLD –, caressant la chimère qu’un vote majoritaire pourrait régler les choses. Alors qu’il avait en face de lui des gens qui étaient prêts à tout pour prendre le pouvoir et qui le signifièrent bien. »

À partir de là, l’Algérie vit la descente aux enfers. Le régime victorieux de la crise de l’été 1962 s’empare de tout le pays. De coup de force en coup de force, le régime façonne les institutions –alors qu’elles doivent être l’émanation du peuple –de sorte à maintenir sa mainmise sur le pays ad vitam ad aeternam. À l’exception des élections de 1990 et 1991, toutes les autres ont été préfabriquées à l’image de celles d’avril 1948, préparées par le gouverneur Naegelen. Et tous les gouvernements successifs ont un point commun : empêcher le peuple d’avoir un regard sur ses propres affaires.

Enfin, cette suprématie a duré de 1962 à 2019. Profitant de l’erreur stratégique du régime qui voulait reconduire un homme cliniquement mort à la tête de l’État, le peuple algérien refuse cette fatalité. Depuis cette date, il se mobilise pour exiger la restitution du pouvoir à son propriétaire, le peuple algérien. Les slogans repris dans les manifestations renseignent sur la colère de la grande majorité du peuple algérien. Car, qu’on le veuille ou non, le régime a fidélisé une clientèle pouvant atteindre les 20% de la population. Bruyante, elle a fait croire pendant longtemps qu’elle était le peuple.

 En effet, en l’absence du peuple, c’est elle qui a occupé le terrain pendant plusieurs décennies. En un mot, le peuple algérien a payé le prix de son slogan en 1962 : « sept ans, ça suffit. » En refusant de prendre parti, les vainqueurs de la crise de l’été 1962 l’ont invité à rentrer à la maison et à se taire à jamais. C’est cette erreur qu’il ne faudrait pas refaire en 2020.   

 

 

 

 

   

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Publié par Ait Benali Boubekeur - dans Actualité

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  • Il est du devoir de chaque citoyen de s’intéresser à ce qui se passe dans son pays. C'est ce que je fais modestement.
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