
La nomination et puis la révocation de Samir Chaabna révèlent la gestion approximative des affaires de l’État. En effet, une telle affaire ne risquerait jamais de se produire si chaque institution faisait son travail en toute indépendance. Or, en Algérie, les services de sécurité ont pour la seule mission de régenter la société.
En tout cas, dans cette affaire, il y a deux scénarios possibles. Soit Chaabna a menti sur sa situation. Cela prouve que les services n’ont pas fait leur travail d’enquête. Soit il n’a pas caché le fait qu’il détienne la double nationalité. Et là le gouvernement Tebboune-Djerad est d’un amateurisme indescriptible. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que dans les deux cas les services de contrôle ont failli.
Toutefois, si sous l’ère Tebboune, c’est la première affaire du genre, il y a trois ans, sous l’ère Bouteflika, lors de la formation du gouvernement Tebboune, une nomination, rappelons-nous, a défrayé les chroniques. Il s’agissait de l’affaire Messaoud Benagoun. Pour accéder au poste ministériel, Benagoun aurait falsifié son diplôme universitaire et menti sur son casier judiciaire.
Ce sont donc ces pratiques immorales qui ont poussé les Algériens à casser le mur de la peur un certain 22 février 2019. Bien entendu, ces affaires sont mineures par rapport à l’œuvre de destruction orchestrée sous l’ère Bouteflika. Ainsi, depuis le 22 février 2019, les Algériens, dans leur grande majorité, ont acquis la conviction que ce régime ne pouvait pas évoluer vers un système démocratique. Comme le prouve la multiplication des affaires, tout est géré dans l’opacité et le refus de créer les équilibres de pouvoir afin que les affaires du pays ne soient pas conduites dans l’affrontement et la crise permanente.
Or, malgré la promesse d’une nouvelle Algérie, on constate aisément, depuis l’aggravation de la pandémie, que le régime n’a aucune vision ni aucun cap. Il s’appuie uniquement sur ses bras sécuritaires pour faire taire les voix discordantes. Alors que cette pandémie a été traitée avec intelligence dans les pays qui se respectent, en Algérie, la politique de confinement –à vrai dire, il n’y a jamais eu de confinement sanitaire, mais plutôt un confinement politique –vise d’autres objectifs. À tel point que le premier ministre s’en remet aux prières des fidèles pour la disparition du coronavirus.
Si cela n’est pas un constat d’échec, il faudra qu’on nous l’explique. Pourquoi cet échec ? Que Djerad le veuille ou non, l’Algérie n’a jamais confiné. À partir de là, les contaminations ne peuvent qu’accroître. Ce n’est pas l’inconscience d’une catégorie, pour reprendre l’expression de Djerad, qui est responsable, mais c’est l’absence d’une politique sanitaire responsable qui est en cause.
Sans être spécialiste en la matière, on comprend que les chaines de transmission du Covid19 se cassent au bout d’un confinement sérieux de 40 à 50 jours. En contrepartie d’une telle contrainte, les gouvernements, en Europe par exemple, ont mobilisé tous les moyens pour que le citoyen ne manque de rien. Du coup, s’il y a une catégorie inconsciente, c’est celle qui gouverne, car elle ne s’est pas donné les moyens de réussir le confinement. D’ailleurs, quand un gouvernement est dépassé dans une affaire comme celle de Chaabna, on se demande comment il peut faire des miracles quand la crise dépasse ses compétences ?