
Une semaine après la diffusion du documentaire sur le hirak, la polémique ne faiblit pas. Bien entendu, il s’agit de réactions légitimes. Bien que l’auteur ait le droit le plus absolu de traiter ce sujet sensible, les téléspectateurs –et notamment ceux qui se reconnaissent dans le hirak –ont le droit de ne pas se reconnaître dans ce travail de Mustapha Kessous.
Le plus grave dans cette histoire, c’est que l’auteur du documentaire n’a pas été honnête avec les participants. Certaines scènes n’auraient pas dû y figurer dans le film. De la même manière, certains participants auraient dû voir leurs visages floutés. Et là, ce n’est pas du domaine de la liberté, car l’accord doit être respecté. Surtout quand on sait que dans les pays où la liberté des personnes est tout le temps menacée, l’exposition des personnes de cette façon peut provoquer des représailles terribles.
Sur le fond, le film ne nous apprend rien de spécial. Au contraire, il brouille les cartes. Car, ce n’est pas le FLN historique qui a libéré le pays il y a 58 ans, comme tente de l’insinuer Mustapha Kessous, que les Algériens remettent en cause. Ces valeureux chouhadas ont accompli amplement leur devoir. Ce qui est remis en cause, c’est le FLN postindépendance qui ne ressemble pas à l’originel.
À partir de 1962, les vrais fondateurs du FLN historique sont soit assassinés, soit exilés, soit emprisonnés. Et ceux qui sont aux responsabilités ont uniment tourné le dos aux promesses du 1er novembre 1954. À tel point que le FLN postindépendance ne peut pas se réclamer du peuple comme pouvait le faire le FLN historique. La raison est toute simple. Le FLN postindépendance s’est emparé de tout ce qui appartenait au peuple : sa souveraineté, ses richesses, son honneur, etc.
Cette gestion catastrophique a conduit à l’une des périodes les plus sanglantes : la décennie noire. Sans vouloir minimiser la violence islamiste, cette tragédie a été la résultante de tous les abus commis depuis l’indépendance. Comment s’est arrêtée cette tragédie ? Ce n’est pas grâce à Bouteflika, comme le sous-entend Mustapha Kessous. Car, de 1992 à 1999, les services de sécurité avaient le contrôle le plus total de la situation.
En tout cas, ses interventions lors du débat montrent que l’auteur est mal placé pour nous parler de cette période. Comme il est mal placé pour parler du problème soulevé par les quelques brebis galeuses en Kabylie réclamant la scission du pays. En tentant d’insérer cette question par l’entremise de l’avocat Athmane Bensalem, l’auteur du documentaire ignore à quel point l’unité nationale est une ligne rouge. D’ailleurs, dès le début du hirak, les partisans de Ferhat Mehenni sont systématiquement renvoyés des rassemblements. La question étant algéro-algérienne, il est logique que ceux qui défendent un autre projet ne s’associent au combat du hirak et des Algériens.
En tout cas, et à mon humble niveau, ce sont ces trois points qui posent problème. Sans vouloir discréditer l’auteur ou dicter à une chaine de télévision sa ligne éditoriale, les réactions doivent être constructives. Or, sur les réseaux sociaux, on assiste à des réactions virulentes. Quels sont les auteurs ? Ce sont les mêmes qui ont attaqué Bouchachi et Belarbi lorsqu’ils ont rendu visite à Belhadj. On trouve aussi les résidus nuisibles du courant islamiste qui ne présente la future Algérie que sous le prisme de leur morale rétrograde. Heureusement, le hirak s’est démarqué, depuis sa naissance, de ces éradicateurs et de ces conservateurs. Le principal souci du hirak est le départ de la dictature et son remplacement par une République où tous les Algériens seront égaux en droit et en devoir.