
Dans une tribune fort instructive, une quarantaine de nos compatriotes donne une leçon politique au régime. En effet, le plus dur dans cet exercice est de récapituler les revendications des quinze mois du hirak en y mettant des mots justes. D’emblée, ils se demandent –et cette question est destinée à toute l’opinion –comment un pouvoir qui piétine les droits de l’homme, à travers les arrestations arbitraires, puisse respecter les libertés des citoyens dans le cadre d’une nouvelle constitution ?
À vrai dire, ces questions qui fâchent n’auront jamais de réponse. Car, quand le régime parle de citoyens, il n’entend pas généraliser cette acception à tous les Algériens, mais il parle de ceux qui sont d’accord avec lui. Il n’y a qu’à voir l’accès aux médias public. Bien qu’ils soient théoriquement le bien public, il n’y a que les flatteurs qui y ont droit. Et quand les autres Algériens militent ouvertement pour le changement, le régime les envoie directement dans ses geôles. À tel point que dans quelque temps, les prisonniers d’opinion dépasseront les détenus de droits communs.
Ainsi, au lieu de répondre aux revendications légitimes du hirak –ce sont en plus des exigences du 21e siècle –, le régime tente de se régénérer en proposant des solutions des années 1960. En effet, si on compare la constitution de Ben Bella à celle de Tebboune, les institutions subissent la même hégémonie d’un seul homme sous la couverture du haut commandement militaire –nos soldats sont dans la même situation que le reste de la population –, qui est le parti politique le plus puissant du pays.
Toutefois, après toutes les humiliations subies depuis l’indépendance, la grande majorité du peuple algérien est sortie dans la rue un certain 22 février 2019. Que le régime le veuille ou non, cette date est à la fois un repère et un projet de rupture. Car, quand un régime dilapide plus de 1000 milliards de dollars, quand un régime tente de reconduire un homme cliniquement mort à la tête du pays, il est évident que ce régime est définitivement disqualifié.
En plus, est-ce que l’Algérie est condamnée à être gouvernée indéfiniment selon le modèle des années 1960 où les contre-pouvoirs sont inexistants ? Après une carrière de plus de 50 ans au sein du régime intolérant, on ne peut pas incarner le renouveau. Hélas, quand le contrôle vient de la rue –il n’y a aucun pouvoir intermédiaire entre le pouvoir exécutif et le citoyen –, ces responsables montent au créneau pour dénoncer la trahison des millions de citoyens. Pire encore, ils prêtent à la religion des fonctions contraire à sa mission, tel ce ministre qui interdit aux citoyens de critiquer les gouvernants même lorsque ceux-ci sont des corrompus, des voleurs, etc.
Enfin, il est évident que le départ des têtes d’affiche du système –les institutions restent, car elles sont au service de la nation –est nécessaire. Est-ce qu’une transition s’impose ? Sans doute oui. En tout cas, le peuple algérien souverain saura choisir librement ses représentants respectant les règles de la démocratie, notamment la séparation des pouvoirs. Pour les signataires du manifeste pour une constitution du peuple souverain, la solution réside dans l’élection d’une Assemblée nationale constituante. Mais, pour ce faire, il faudrait débattre avec toutes les parties pour que cette solution soit consensuelle. Et quoi qu’il en soit, dans la future constitution du peuple algérien, ce dernier doit paraitre le détenteur du pouvoir réel et non celui qui adopte la constitution pour offrir des pouvoirs illimités à un seul homme.