À l’occasion du 55eme anniversaire de l’indépendance nationale, le chef de l’État, Abdelaziz Bouteflika, adresse un long message au peuple algérien. On peut distinguer trois temps. Immanquablement, le rappel historique est celui qui peut faire un large consensus.
En effet, c’est grâce aux meilleurs fils de l’Algérie, qui ont sacrifié leur vie pour que tous les Algériens vivent en liberté, que notre pays recouvre son indépendance en juillet 1962. Est-ce que tout le monde est logé à la même enseigne ? De Ben Bella à Bouteflika, il n’est pas sûr que cette égalité soit respectée.
Toutefois, sur les deux autres thèmes, à savoir le bilan postindépendance et les perspectives d’avenir, il est difficile de partager la même vision. Et pour cause ! Si le pays traverse de multiples crises depuis 1962, la responsabilité incombe à ceux qui gèrent les affaires par la force. D’ailleurs, depuis 1962, la relation entre gouvernants et gouvernés n’a jamais été apaisée.
Bien que le chef de l’État parle d’une volonté inébranlable des dirigeants de construire des institutions justes, cette vision ne peut pas être partagée par le citoyen lambda. En effet, même si l’indépendance de notre pays reste l’une des plus belles œuvres du siècle dernier, tous les Algériens ne profitent pas des fruits de l’indépendance.
D’ailleurs, avant d’exiger de la France des excuses –même les dirigeants français admettent que la colonisation était une œuvre injuste et inhumaine –, ne faudrait-il pas, au préalable, que les Algériens fassent le bilan de l’indépendance ? Ainsi, les dirigeants ne pourraient pas essuyer tous les échecs sur le dos de la colonisation.
En outre, bien qu’il y ait incontestablement des réalisations qui ont été accomplies, est-ce que le résultat est satisfaisant compte tenu des moyens dont dispose le pays ? Cette question se pose, sans discontinu, sur toute la période postindépendance.
Et lorsque le chef de l’État affirme que c’est la décennie noire qui a freiné le développement de notre pays, cette explication paraît très légère. Le mal algérien remonte au lendemain de la signature des accords du cessez-le-feu. Le refus de l’état-major de l’armée de respecter la légalité révolutionnaire explique tous les balbutiements postindépendance.
Cela étant dit, le propos ici n’est pas de disculper la violence islamiste ni leur idéologie –en exploitant la religion à des fins politiques, ces hommes politiques tentent de ressusciter les pires dictatures de l’histoire de l’humanité –qui sont à l’origine de beaucoup de malheurs dans la totalité ou peu s’en faut des pays musulmans.
Enfin, malgré le discours d’autosatisfaction, les bons résultats économiques ne sont obtenus que lorsque les prix du pétrole sont élevés. Et dès lors que ces prix dégringolent, le pays rentre aussitôt de plain-pied dans la crise. Cela se vérifie à deux reprises ; en 1986 et 2015.
Pour redresser la situation, le chef de l’État exhorte les Algériens à consentir des efforts. Ceci est évidemment un devoir. Mais, avant de se tourner vers les faibles revenus, ne faut-il pas demander davantage de participation aux grandes fortunes dont la provenance n’est pas forcément saine
Aït Benali Boubekeur