Malgré la tentative malsaine de privatiser, voire de politiser, la mémoire de Matoub Lounès, son héritage ne peut être qu’un fond commun. En plus, il faut rappeler d’emblée que le chanteur populaire s’est toujours battu pour que l’Algérien, quelle que soit sa région, recouvre sa dignité.
Est-ce que, comme le prétendent les séparatistes, la mémoire de Matoub Lounès doit être confinée à la région de Kabylie ? Bien que le régime tente autant que faire se peut de circonscrire le combat de Matoub Lounès à une seule région, il n’en demeure pas moins que le grand chanteur a une dimension et une stature dépassant largement sa région natale.
En tout cas, de son vivant, ces tentatives de minimiser son combat n’ont pas eu l’effet escompté. D’ailleurs, au pire moment des menaces qui le guettaient, il n’a jamais dévié sa trajectoire d’un iota. « Je sais que je vais tomber entre leurs mains, il est probable qu’ils m’auront un jour ou l’autre. Cependant, quoi qu’il arrive, l’Algérie est ma patrie, je préfère mourir parmi les miens et si on m’assassine, qu’on me couvre du drapeau national », a-t-il levé toute ambigüité.
Cependant, là où le bât blesse, c’est cette exploitation effrénée de la mort de Matoub Lounès pour une cause qui n’était pas la sienne de son vivant. Bien évidemment, personne ne peut empêcher une partie de la population de se réclamer de lui.
Mais, pourquoi veulent-ils faire de Matoub Lounès un symbole de l’indépendance, alors que l’Algérie était sa préoccupation principale ? Hélas, il est difficile de faire entendre raison à ceux qui se considèrent les seuls héritiers de Matoub Lounès et d’autres événements, tels que le printemps berbère, le printemps noir, etc.
Pour conclure, il va de soi que la mémoire de Matoub Lounès dépasse le cadre restreint de la seule région de Kabylie. Ses valeurs sont à la fois rassembleuses et universelles. Réduire son combat à sa seule région natale, ce serait ignorer son rayonnement et son aura à travers l’Afrique du Nord.
Enfin, il est regrettable que les partis et les associations laissent le terrain au MAK pour la célébration d’un événement aussi capital. Cela dit, leur silence est compréhensible dans la mesure où une présence massive serait exploitée par Ferhat Mehenni pour renforcer son discours sur la prétendue unité politique de la Kabylie.
Aït Benali Boubekeur