20 avril 2017 4 20 /04 /avril /2017 18:27

« Nous sommes cependant quelques-uns à penser que la poésie kabyle est tout simplement une poésie algérienne, dont les Kabyles n’ont pas la propriété exclusive, qu’elle appartient au contraire à tous les Algériens », réponse de Mouloud Mammeri au plumitif du système Kamel Belkacem du journal El Moudjahid en avril 1980.

Cet extrait résume, à lui tout seul, l’esprit du 20 avril. Bien que des forces revanchardes essaient de le galvauder, il n’en demeure pas moins que le vrai printemps berbère s’inscrit dans un cadre national algérien.

En effet, après une période de verrouillage tous azimuts, allant de 1962 à 1979, la société a manifesté sans désir d’émancipation. Est-ce que le printemps berbère est survenu ex nihilo ? Depuis la tenue du séminaire dans la région grenobloise en 1978, Ali Mécili, bras droit de Hocine Aït Ahmed, a fait adopter une plateforme dans laquelle les revendications culturelles et démocratiques occupaient une place prépondérante. De retour au pays, ces militants ont investi le terrain.

Ainsi, à la rentrée universitaire 1979-1980, la situation était la suivante : les partis représentatifs étaient le FFS de Hocine Aït Ahmed et le PRS de Mohamed Boudiaf, mais les organisations estudiantines étaient dominées par l’alliance FLN-PAGS. D’où la naissance des comités autonomes regroupant en leur sein tous les courants hostiles au régime inamovible.

Cependant, bien que les événements du 20 avril soient provoqués par la stupide interdiction de la conférence que devait donner Mouloud Mammeri le 10 mars au campus de Hasnaoua, la société était déjà en ébullition. Et sans les manipulations et la propagande du régime, le mouvement aurait touché l’ensemble du territoire. Invité de TF1 en avril 1980, Ali Mécili a énuméré les nombreux soutiens des villes, telles que Sidi Bel Abbes, Oran, Batna, à la cause démocratique soulevée à Tizi Ouzou.

Par ailleurs, si les militants du FFS ont été, dès les premières heures, au-devant de la scène, le parti ne s’est pas précipité. Il n’a pas non plus tardé à manifester son soutien en organisant un grand rassemblent à la place du 1er Mai, le 7 avril 1980. Dans l’une des banderoles, les organisateurs se demandaient alors : « 1964 : 2000 morts ! 1980 : combien vous faut-il ? »

Dans le tract du même jour, le parti a annoncé la création du comité de défense des droits culturels en Algérie. Dans la foulée, un comité anti-répression a été mis en place. Ce dernier avait pour mission « d’expliquer la nature du mouvement, d’informer sur ses développements, de faire des démarches pour libérer les prisonniers de la communauté universitaire, faire cesser la répression et faire respecter les libertés démocratiques en Algérie.»

Hélas, jusqu’à l’ultime minute, le régime n’a jamais envisagé le dialogue. Ce qui a conduit à la triste répression du 20 avril 1980.

Pour conclure, il va de soi que le FFS n’était pas seul sur le terrain. Il y avait d’autres organisations. À l’époque, les alliances étaient possibles. Ce rappel est nécessaire, car aujourd’hui certains pyromanes veulent privatiser cette date. Évidemment, leur démarche n’a rien à envier à celle du régime qui s’est accaparé du récit national.

Enfin, il est clair que dans l’esprit des acteurs de l’époque, le mouvement berbère se confondait avec le récit national. Coupant court à toute autre interprétation, Mouloud Mammeri n’a-t-il pas déclaré ceci : « Je revendique l’unité de l’Algérie, mais je dis en même temps que les Kabyles, avec les autres bien sûr, forment la texture de l’unité nationale. »

La question qui se pose désormais est de savoir comment certains utilisent-ils ces symboles pour prôner une démarche antinomique à la leur ? En d’autres termes, peut-on trahir une cause pour en épouser une autre ? Hélas, il existe des hommes pour qui les principes ne sont pas déterminants.

Aït Benali Boubekeur

 

 

   

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