Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
5 février 2017 7 05 /02 /février /2017 10:23

Beaucoup de personnes situent le début de la bataille d’Alger à la fameuse « grève des huit jours » (28 janvier-4 février1957). En effet, si l’on considère le déchainement des paras, commandés par le général Massu en vue de la casser –une grève à laquelle a appelé le CCE (comité de coordination et d’exécution) issu du congrès de la Soummam –, comme le point de départ, il sera difficile de classer une série d’événements qui se sont déroulés tout au long de l’année 1956 à Alger.

De toute évidence, bien que les villes ne connaissent pas un grand emballement comme le sont les campagnes après les premières actions de novembre 1954, il n’en reste pas moins que le mouvement de libération est scruté à la loupe. Malgré les intimidations, à partir de juin 1956, les événements s’accélèrent. À l’exécution de deux membres du FLN, le 19 juin 1956, à la prison de Barberousse, la cellule du FLN algéroise « organise pour la première fois des attentats aveugles au revolver contre la population européenne », écrit le grand historien, Pierre VIDAL-NAQUET, dans « la torture dans la République (1954-1962) ».

Désormais, le conflit n’a plus de limites. Après une préparation de longue haleine, les colons passent à la vitesse supérieure. Le 10 aout 1656, la Casbah est secouée par une déflagration faisant une centaine de morts. Bien que les auteurs [Philippe Castille et Michel Fechoz] avouent avoir perpétré l’attentat, aucune sanction n’est prise à leur encontre.

Par ailleurs, pour venger les victimes innocentes, la réponse du FLN ne se fait pas attendre. Ce sont les fameuses bombes déposées dans les différents bars et cafés, fréquentés par les Français d’Algérie. Cela dit, sans qu’ils se rendent compte, les planificateurs de ces attentats ignorent que leurs actions gênent considérablement l’action des membres du CCE préparant une grande mobilisation politique à l’occasion de l’ouverture du débat sur la question algérienne à l’ONU, prévu fin janvier 1957.

Bien évidemment, il ne s’agit pas d’incriminer qui que ce soit. Mais, historiquement parlant, ces attentats ont accéléré le transfert du pouvoir des civils aux militaires. « Le 7 janvier 1957, sur l’ordre de Robert Lacoste, le superpréfet d’Alger, Roger Baret, signe une ordonnance déléguant au général Massu, commandant de la 10e division parachutiste, les pouvoirs de police dans le département d’Alger, c’est-à-dire le soin de liquider le terrorisme urbain et de briser la grève générale préparée par le FLN », note l’éminent historien.

Jusqu’au mois d’octobre 1957, une date correspondant à la fin de la bataille d’Alger, le rouleau compresseur colonial écrase tout sur son passage. Malgré les démissions spectaculaires de Paul Teitgen, haut responsable de l’administration et du général de Bollardière, qui récusent les méthodes du général Massu, la répression va crescendo.

Selon Pierre VIDAL NAQUET, « Paul Teitgen fut amené à signer 24000 assignations à résidence. Sur ce nombre, d’après ses déclarations publiques, 3024 individus devaient disparaître, morts sous la torture, ou sommairement exécutés. Ce chiffre est sans aucun doute inférieur à la réalité : les militaires ne déclarèrent pas toutes les arrestations et bien des victimes n’eurent pas le loisir d’être assignées à résidence ».  

Peu à peu, l’emprise de l’armée sur la vie politique française s’accentue. En mai 1958, elle refuse carrément l’investiture du président du Conseil, Pierre Pflimlin. Son seul tort est d’avoir déclaré que le problème algérien ne pourrait être résolu sans une négociation. Ce sont donc ces militaires –qui ont conduit la bataille d‘Alger – qui vont achever la IVe République.

Pour conclure, il va de soi que la bataille d’Alger ne peut pas être résumée en quelques lignes. Cela dit, d’un point de vue stratégique, les membres du CCE avaient besoin d’un calme relatif à Alger en vue de gérer la révolution. De leur coté, les révolutionnaires ne pouvaient pas rester bras croisés quand les membres de leur réseau se faisaient tuer. Résultat des courses : les réseaux et la direction politique sont décimés.

D’ailleurs, c’est après l’arrestation de Larbi Ben Mhidi que les survivants du CCE décident de quitter le pays. Ce choix s’avère lourd de conséquences. À partir du moment où la révolution est gérée loin des réalités du terrain, les nouveaux dirigeants ne comprennent pas forcément les souffrances du peuple. Ainsi, après l’indépendance, ces chefs extérieurs vont jusqu’à interdire au peuple algérien de s’immiscer dans ses affaires, alors qu’en novembre 1954, les révolutionnaires ont pris les armes contre cette exclusion.

Aït Benali Boubekeur        

Partager cet article
Repost0

commentaires

M
La bataille d'Alger, la guerre d'Algérie, le passé de l'Algérie, l'origine de l'Algérie, l'Algérie tout cours ? Voilà autant de questions posées par le citoyen lambda, sans en avoir la réponse exacte, tellement un flou total a enveloppée ces situations. Du temps de la colonisation, on nous apprenait que l'Algérie est Française, mais , après une guerre sans merci, on découvrira que l'Algérie est une nation indépendante avec son peuple et ses institutions. Seulement, très peu de temps après la joie qui fut éphémère, on nous apprenait que nous sommes des Arabes et là on comprenait plus rien. Les faits de la révolutions furent dévoyer ainsi que les origines des Algériens. Une chape de plomb enveloppa tout notre passé, y compris ce passé récent de la révolution. La bataille d'Alger ? Seul les acteurs du moment peuvent en témoigner.

Contactez-Moi

  • : Blog AIT BENALI Boubekeur
  • : L’école algérienne ne s’est pas attelée, en ce qui concerne l’enseignement de l’histoire, à la transmission du savoir. L’idéologisation de l’école l’a emporté sur les impératifs de la formation. Or, les concepteurs de ces programmes préfèrent envoyer leurs enfants dans des écoles occidentales. Du coup, la connaissance de l'histoire ne passe pas par l'école.
  • Contact

  • Ait Benali Boubekeur
  • Il est du devoir de chaque citoyen de s’intéresser à ce qui se passe dans son pays. C'est ce que je fais modestement.
  • Il est du devoir de chaque citoyen de s’intéresser à ce qui se passe dans son pays. C'est ce que je fais modestement.

Recherche

Catégories