29 novembre 2016 2 29 /11 /novembre /2016 18:33

Par Said Radjef. Le 29 novembre 2016

Je me balade ainsi dans mon inconscient à observer ces délicieux instants de bonheur d'une enfance perchée sur les falaises montagneuses du Djurdjura, du temps ou j'étais le prince de Tiniri. Je me souviens de grand père et des longs sillons que sa pair de bœufs traçait dans la terre rocailleuse, pendant que des oiseaux piquaient des vers…Orgueilleux, vaniteux et imprévisible, grand père m'a donné le nom de "Dawzi", une sorte de kamikaze en Kabyle. 
Et puis comme ça, un jour d'automne, sans trop savoir pourquoi, d'un seul coup, tout a changé… Mon père contraint d'aller chercher la subsistance quotidienne, m'emmena avec lui à Oran, Valmy, loin des prairies, de l'odeur des vaches, de Pitchou mon chien préféré, des sources, des puits ou j'ai failli me noyer à de nombreuses reprises en cherchant la truite et les anguilles, des défis lancés torses nus au tonnerre et aux éclairs pendant les automnes orageux, des courses tout le long des rivières qui redescendent du Djurdjura, des bagarres interminables pour notre gloire, des pièges aux grives, aux étourneaux et aux perdrix, des misères faites à Ravah Ath Djaroun et Messaouda Ouzaghar qui aimait tant nous montrer son fusil de chasse…
Pour ma troisième année primaire, mon père m'avait inscrit dans une école située sur le chemin de Senia, à quelques kilomètres d'Oran…En dépit de mes leçons coraniques à la zaouïa des Ait Kaci, je ne parlais qu'en kabyle, ce qui faisait marrer à chaque fois mes camarades de classe…Au bout de quelques semaines, j'étais redevenu un enfant méconnaissable, dépassionné, sans ardeur malgré l'attention particulière de l'institutrice, Mme Sabrina, qui a tout fait pour me faciliter les choses…
Et puis un jour, durant l'hivers, grand père débarque à Oran, à l'occasion de la naissance de ma petite frangine Zâazi, troisième naissance de ma mère. Son séjour Oranais a complètement bouleversé ma vie. Grand père, après deux jours passés à la maison, fugua. Un avis de recherche fut lancé. De la porte entrouverte de sa chambre, j'entendais ma mère faire un tas de reproches à mon père pendant que des officiers de la base de Tafraoui, une Russe et une Yougoslave tentaient vainement de la calmer.
"Tu n'as jamais aimé mes parents et ma famille, c'est pourquoi il est reparti sans nous le dire", s'écria ma mère en sanglots. Réaction œdipienne, je n'ai jamais autant détesté mon père que ce jour. Non seulement, il m'a arraché à Tiniri, mais il a rendu ma mère malheureuse. Je voulais tout simplement le tabasser. Mais deux jours après, contre toute attente, grand père réapparut soudainement, accompagné de quelques vieux… A la vérité, grand père n'avait pas pu décliné (résister à) l'invitation de la zaouïa de Sidi Boumedienne . Sur invitation des fidèles de la Mosquée de Valmy (aujourd'hui El Karma), grand père passa deux jours à Tlemcen sans aviser sa fille…Ce fut une véritable fête…
Le retour de grand père m'avait totalement libéré. Pour la première fois, je m'étais associé aux autres enfants au jeu de cache-cache, ou on m'avait confié le rôle du colonel Amirouche contre les "n'sara", alors que les rôles de Zabana, Lotfi et Ben M'hidi étaient confiés à Lastel, Belhadjer et Kouider qui devint par la suite mon meilleur ami…Comme ça, sans savoir trop comment, je m'étais mis a parler l'Algérien avec un accent Oranais comme si j'étais…J'avais complètement oublié que j'étais un Kabyle du Djurdjura. J'étais redevenu moi-même, avec plus d'enthousiasme, plus d'intelligence et de ruse…Je me sentais bien dans ma peau d'Algérien.
Un jour, pendant la récréation, mon ami Kouider me fit part de son projet de chaparder le miel, les dindes et les poules de Zoulikha qui tenait une ferme juste à coté de l'école…

commentaires

M
Voilà un sujet qui semble préoccupant, lorsqu'on sait que cette notion de "séparatisme" n'est en fait qu'une invention politicienne de ceux qui veulent et qui s'accaparent toute la richesse de ce beau pays. La Kabylie a, certes, enfanté des hommes et des femmes de grandes envergures, mais qui se sont battu pour l'Algérie et non pour la Kabylie. Ce combat , de longue date, avait comme objectif de se réapproprier ce pays, qui s'appelle l'Algérie, d'entre les mains du colonisateur. Ce colonisateur qui n'avait, de cesse, multiplié les approches séparatistes pour pouvoir régner . N'est ce pas cette devise en langue du colonisateur qui disait: séparer pour régner ?. <br /> Ayant acquis ces mêmes réflexes, après l'indépendance du pays, le pouvoir en place a trouvé grâce auprès d'une société qu'il manipula à sa guise pour pouvoir régner. Aujourd'hui, le combat continue et ce combat vient justement des hommes et des femmes de cette Kabylie à l'effet de se réapproprier d'abord leur identité, leur langue et enfin se réapproprier ce beau pays qu'est l'ALGERIE.
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