Dès sa création, le mouvement national algérien porte en soi une injustice criante : le déni de l’identité authentique de l’Algérie. Bien que la dénonciation du joug colonial soit le dénominateur commun susceptible de souder les rangs du parti nationaliste, il n’en reste pas moins que le parti est fragile idéologiquement.
En effet, chaque tentative de débat à l’intérieur des structures du parti peut déboucher sur une grave crise. Et si la crise était étouffée à temps, le parti se fragiliserait davantage par les exclusions en cascades.
En tout cas, c’est ce qui arrive au PPA-MTLD en 1949. Au départ, les activistes remettent en cause « le fonctionnement antidémocratique du parti. » Pour corroborer leur thèse, Ouali Bennai et ses amis contestent la définition de l’Algérie comme étant une nation exclusivement arabo-musulmane.
Quoi qu’il en soit, si le parti n’était pas totalement fermé, cela donnerait lieu à un débat paisible sur les contours de la future nation en formation. Or, comme l’écrit si bien l’éminent historien, Mohamed Harbi, la crise berbériste « révèle la difficulté pour le nationalisme algérien d’articuler ensemble la notion de nation et celle de citoyenneté. »
Toutefois, bien que la revendication soit exploitée ensuite par un groupuscule, emmené par Ali Yahia Rachid, pour en faire un problème identitaire, il n’en reste pas que la majorité des sections en Kabylie sont demeurées attachées à la direction. En d’autres termes, le courant défendu par Rachid Ali Yahia est minoritaire en Kabylie. À vrai dire, ce mouvement se manifeste au sein de l’émigration. En Algérie, à en croire les témoins de l’époque, il se concentre sur une même zone : Ain El Hammam et Larbaa Nath Irathen.
Aujourd’hui, des propagandistes anti-Algérie justifie la dérive séparatiste en se reconnaissant dans le combat des militants de 1949. Cet argument ne tient évidemment pas la route. Et pour cause ! Ouali Bennai et ses amis étaient plus attachés à l’Algérie que ceux qui les ont exclus du PPA-MTLD. En effet, si Messali et ses amis parlaient à peine de l’Algérie, les exclus avaient un seul projet en tête : le sort de l’Algérie algérienne.
En somme, il va de soi que la crise berbériste, ou la crise de l’algérianité, pour reprendre l’expression de l’acteur direct de cette crise, Mabrouk Belhocine, soulève avant tout le manque de démocratie au sein du parti indépendantiste. Mais, à l’époque, celui qui remet en cause l’autorité du chef est systématiquement puni.
Ainsi, les sanctions qui s’abattent sur les activistes –celles-ci touchent les militants des régions non berbérophones, à l’instar de Mohamed Lamine Debaghine – traduisent les difficultés de ces organisations à s’émanciper de l’influence du chef. Hélas, en Algérie, toutes les organisations sans exclusives, souffrent encore de nos jours, à des degrés divers, de ce problème.
Aït Benali Boubekeur