27 septembre 2016 2 27 /09 /septembre /2016 16:24
Djurdjura: Informateurs contre citoyenneté.

Par Saïd Radjef. Le 27 septembre 2016
Une nuit avec les patrouilles du SSI de la gendarmerie.

Le Djurdjura c'est un million deux cent mille habitants, 3.000,00 Km2, dont 80% de montagnes et d'espace rural et 800kms de pistes et de chemins de wilaya qui s'ajoutent au reste du réseau routier (RN) estimé à 600kms. Soit une moyenne de 400habitants au KM2, et des zones dépourvues totalement de couverture sécuritaire. Ou presque. Avec à peine 800 gendarmes pour toute la wilaya de Tizi ouzou, on a un ratio largement en deçà de la moyenne nationale et des normes sécuritaires universellement requises.
La Kabylie est-elle donc suffisamment sûre au quotidien pour y vivre sereinement, et tant qu'à faire, en famille avec des enfants? En général, oui. En particulier, ça dépend des endroits. Pour cela, nous avons accompagné une brigade du SSI de la gendarmerie, dans les zones reculées du Djurdjura…Adila, M'kira, Boumahni, Iâgounen, Tamdhikt, Assi Youcef, Ait Bouadou, Mechtras, Ait koufi, Mahvane…sont autant d'endroits qui attirent les barons de la drogue, de l'alcool et du sexe. Mais aussi les pilleurs de sable qui empruntent habituellement les pistes qui traversent ces bourgades sans surveillance et sans couverture sécuritaire. Cependant, la drogue et l'alcool constituent la principale source d'insécurité et de criminalité dans ces régions.
La guerre des bars.
La veille, alors que les gendarmes de la brigade de Tizi ghennif arrêtent deux dealers dans la bourgade de Senana, après une opération soigneusement menée par le commandant de compagnie, les éléments du SSI reçoivent un coup de fil. Il est question de bars clandestins et de revendeurs de drogue, dans les villages perchés sur les balcons de M'kira, à la limite de la wilaya de Boumerdes. Le lendemain, les éléments du SSI, après avoir réglé les dernières retouches, opèrent une descente . Il est presque vingt deux heures . "C'est un bon tuyau, mais il reste à savoir si nos véhicules très voyants n'ont pas alerté les informateurs des bars clandestins et des revendeurs de drogue", dit le lieutenant. La "prémonition" de l'officier s'avéra juste. Arrivés sur les lieux, les éléments du SSI trouvèrent des lieux déserts mais des traces encore fraiches de l'activité illicite…En face des véhicules signalés et tout au long du trajet, des jeunes adossés aux murs, manipulent des portables. Il n'y a aucun doute, l'informateur ou les informateurs sont parmi ces jeunes qui errent encore à une heure tardive de la nuit. Mais comment les reconnaitre? Le capitaine et le lieutenant les scrutent attentivement comme pour mémoriser leurs visages.
Il est minuit. La patrouille redescend des collines de M'kira et traverse les bourgades de Adila et des Ouled Mariem. Deux chauffeurs de camions, eux aussi alertés, déchargent à l'improviste, tout près d'un cimetière, au milieu de la piste, leurs chargements de sable et prennent la fuite. "On les a encore ratés", déplore le lieutenant.
Dans ces zones sans couverture sécuritaire, l'activité criminelle est ordinaire. Elle est pratiquée par des "desperados" usés par le chômage et encouragés par le gain facile. Des gens sans scrupules, pour l'essentiel des enfants du coin qui exercent des activités illicites, l'extraction du sable et la vente de l'alcool sans papiers. Pour quelques dinars de plus, ils sont prêts à tout car ils ne savent rien faire d'autre…Il est très dangereux de trainer dans ces zones à une heure tardive de la nuit, car à tout moment une mauvaise rencontre peut surgir…
Une heure du matin, la patrouille prend la direction de Boghni.

commentaires

M
Je me permet de rapporter ce recit de Mohamed Tabeche ,artiste peintre, qui a une valeur mémoriale sur la gestion des villages de kabylie qu'on regrette énormément. <br /> "L’organisation sociale des villages de Kabylie était un exemple de démocratie laïque qui a suscité bien des débats, "Thajmaïth" pluriel "Thijmouya", ou "larch", pluriel "Larach", ont pu fonctionner efficacement pendants des siècles, sans policier, ni gendarme, ni militaire, ni garde champêtre, etc. Aujourd’hui, dans les discussions, il y a une confusion entre les organisations et les fonctions ancestrales authentiques, qui n'ont, certes plus cours aujourd'hui, mais dont il en subsiste quelques bribes, avec les organisations et fonctions introduites par les colonisateurs. "Lamin" était un personnage clef dans l'organisation du village en Kabylie, président de Tajmaïth, il n'est pas un élu à proprement dit, il est désigné parmi les "Teman", pluriel de "Tamen" membres de cette dernière, représentants les groupes de familles "Adhroum" au pluriel "Idherman" c’est à dire quartiers du village. Sa nomination lui (Lamin) confère un pouvoir étendu et renforce le respect de tous les villageois. La durée de son mandat est indéterminée, elle dépend de sa capacité à conserver ses facultés physiques, mentales et aux différents facteurs liés à ses nouvelles alliances et de celles de ses proches : mariages par exemple. Dès qu'intervient un élément nouveau qui pourrait mettre en doute ces capacités, facultés ou intégrité, il demande à démissionner de son poste. Conseiller, médiateur, homme de confiance, dépositaire de la mémoire collective, protecteur intègre du (qanoun) et du code de l'honneur (annîf) qui assurent la sécurité des personnes, des biens, des familles, des communautés parentales …. Louman (pluriel de lamin) ont maintenu pendant longtemps les mémoires des villages et de la Kabylie, jusqu'aux environs du début de la révolution Algérienne en 1954.<br /> Cette région de l’Algérie du nord, choyée par la nature avec sa mer, son Djurdjura ses forêts, ses vergers, ses rivières, aux décors de cartes postales ou tableaux de maitres, est devenue, en l'espace d'une revendication démocratique suivi d'une révolte juvénile, contre ce pouvoir inique, un dépotoir à ciel ouvert. Et oui, c’est la triste vérité au point de se surprendre à vouloir se placer des œillères ou devenir momentanément presbyte et myope à la fois, tellement le long des routes, chemins et pistes on voit toute sorte de détritus ainsi que des canettes, des bouteilles, du plastique…C’est bien dommage, car en Kabylie, il n’y a pas si longtemps (l’assistanat et l’individualisme n’ayant pas encore de place) dans chaque village, les enfants et les adolescents sont initiés par leurs ainés à “tajmait“ (ou comité de village) à “Tiwizi“ (ou volontariat), pour leur apprendre à se sentir concernés et se rendre utiles en s’impliquant à côté des adultes dans les taches d’intérêt commun. Pour exemples, ils défrichent les cimetières, les pistes et les sentiers menant vers les champs et les sources lesquelles sont également nettoyées en été. Aussi, si un feu se déclare (ce qui est rarissime) quelque part au village ou à ses environs, par reflexe sans aucun ordre, ce sont tous les jeunes qui partent l’éteindre dès la première fumée. Celui qui n’y va pas ouvertement sans raison valable, est vite stigmatisé et montré du doigt, car l’intérêt du groupe primait sur l’intérêt individuel. Voilà dans quel milieu (où il n’y avait ni potence ni prison, seule l’autodiscipline guidait les gens) étaient imaginés cette légende et son châtiment (moral). N’est-ce pas «qu’il vaut mieux avertir que guérir». Alors dans notre cas est-ce la régression ou l’EVOLUTION ? C’est à perdre son français ! Ou son kabyle pour ainsi dire.
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M
Monsieur Saïd Radjef, honnêtement ,comment toute cette drogue et ces boissons alcoolisées peuvent elles arriver sur les lieux cités ou autres lieux de la Kabylie ? Ces fléaux ne viennent ils pas de l'extérieur du territoire du Djurdjura et comment ont ils passé tous les barrages (gendarmerie et militaire) installés sur les différentes routes y menant ? Ce qui se déroule sur notre terre kabyle est tout simplement planifié et voulu par ceux-là même qui veulent que cette région succombe et l'incubation, très longue, est silencieuse, dure des années, telle cette maladie silencieuse qui touche à tous les organes du corps. Certes le territoire de la Kabylie est difficement sécurisable, d'ailleurs l'armée Française avait subit les pires pertes durant la révolution, mais toutes les voies qui mènent en Kabylie sont sous surveillance sécuritaire, avec des barrages fixes sur les routes nationales et les chemins de wilaya, malgré ce filtrage, qui n'en est pas un, cette région est submergée de drogue et de boissons alcoolisées. Il n'y a qu'à voir tous ces bas cotés des routes pour constater que ce fléau a dépassé l'inimaginable. Ce ne sont surement pas des petits transporteurs qui livrent autant de bières et autres , au vu des quantités de canettes et bouteilles jetables qui jonchent les abords des routes.<br /> MATOUB Lounes l'avait prédit dans une de ses chansons, je vous laisse le soin de l'écouter.<br /> Déjà, en juillet 2003 Hocine AIT AHMED disait: Force est de constater que les " Arouch" assujettis à la stratégie des généraux ont permis à ces derniers d'atteindre leurs objectifs. Avant l'intrusion des " Arouch " cette région d'Algérie qui ne connaissait pas les mêmes problèmes d'insécurité que d'autres régions du pays était devenue un havre de paix où des milliers de compatriotes originaires de diverses willayas venaient se réfugier avec leurs familles, leurs petites entreprises ou leurs bureaux professionnels privés. Aujourd'hui la Kabylie n'a jamais connu un tel niveau de peur et de paupérisation organisées. Des forces obscures sont lâchées dans les villages, les villes et sur les routes . <br /> No comment .
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