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1 juillet 2016 5 01 /07 /juillet /2016 17:15
Les inquiétudes du général Nezzar sont fondées, mais…

Le drame de la classe politique, notamment celle qui a dirigé en Algérie, c’est qu’elle souffre du problème d’amnésie. En effet, ces acteurs oublient très vite leur passage à la tête des institutions du pays. La dernière sortie médiatique du général Nezzar en est la preuve.

Bien que ces inquiétudes puissent être comprises –cela dit, tout le monde comprend aisément que le général se préoccupe de sa propre situation et non de celle du peuple algérien –, il n’en reste pas moins que durant toute sa carrière il n’a jamais songé à mettre en œuvre les principes qu’il prétend défendre aujourd’hui.

Bien évidemment, le propos ici n’est pas de soutenir les lois injustes sous prétexte que l’ancien homme fort du régime les dénonce. Mais, là où on ne le croit pas, c’est quand il fait semblant d’épouser la cause démocratique. Un proverbe ne dit-il pas : chasser le naturel, il revient vite au galop. Et même si certains veulent être indulgents envers lui, son passé de tyran le rattrapera toujours.

En effet, au moment où les Algériens ont commencé à avoir la parole, et ce, après trois décennies de dictature ayant refusé systématiquement tout compromis avec la société, le chef des armées de l’époque a tout fait pour que les acquis d’octobre 1988 soient littéralement annihilés.

Et quand il dit aujourd’hui que Gaid Salah a tort d’engager l’armée dans la bataille politique –ce qui n’est pas, encore une fois, faux –, dans les années 1990, le haut commandement militaire ne faisait que ça. D’ailleurs, à en croire les mémoires du général Nezzar, n’est ce pas l’armée qui a ramené Bouteflika au pouvoir ?

De quel droit une institution, prestigieuse soit-elle, peut décider, toute seule, de l’avenir d’un pays ? Il y a une seule explication : le haut commandement de l’armée n’a pas veillé sur la démocratie. Nonobstant le retrait des officiers de l’armée du comité central du FLN en mars 1989, comme le rappelle si bien le général Nezzar, il n’en demeure pas moins que le haut commandement –à ne pas confondre avec la quasi-totalité des soldats qui font leur boulot avec abnégation –n’a jamais renoncé à l’activité politique. L’omniprésence des services secrets, à travers l’infiltration de toutes les organisations, dénote de la surveillance sans vergogne de la vie politique du pays.

À l’examen de ces éléments, comment peut-on apprécier la déclaration du général Nezzar appelant les députés à ne pas cautionner le projet liberticide que propose le gouvernement ? Tout le monde sait que le parlement n’a jamais eu le courage de réprouver la moindre décision de l’exécutif. Hormis les députés du FFS et quelques autres courageux, la grande majorité votera le texte sans rechigner.

Cependant, ce que feigne d’ignorer le général Nezzar, c’est que sa responsabilité dans le comportement pusillanime des parlementaires est engagée. En effet, depuis le règne du parti unique jusqu’à nos jours, les décideurs successifs ont tous exercé un chantage intenable afin qu’ils aient une assemblée de godillots.

Pour conclure, il va de soi que la réaction du général Nezzar au nouveau projet de loi réglementant la conduite des anciens officiers de l’armée aurait pu trouver le soutien populaire nécessaire si, durant son règne, il avait garanti les droits élémentaires des citoyens. Hélas, il n’en fut rien. Aujourd’hui, bien qu’il ne faille pas agir comme les ennemis de la démocratie d’hier, la meilleure attitude serait de combattre ladite loi tout en dénonçant les nouveaux convertis à la démocratie.

Aït Benali Boubekeur

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commentaires

M
"Le drame de la classe politique, notamment celle qui a dirigé en Algérie...". C'est ainsi que votre analyse commence, c'est l'adoption du terme politique aux décideurs de ce pays, militaires soient ils. Effectivement, cette faculté de faire, remonte aux différentes étapes de l'histoire contemporaine de notre pays qui fut le théâtre de violences coloniales. Au sortir de cette période , après l'indépendance, le peuple Algérien voulait, souhaitait, hériter d'un Etat démocratique, où les libertés et les droits sont garantis, mais au détour de la période sombre des années 61-62, l'Etat Algérien fut confisqué. Le politique devient alors le propre des hommes forts, militairement, qui décidèrent pour ce pays. <br /> Plus d'un demi siècle de règne, le militaire reste ce dirigeant, sans alternance , qui s'accorde ce privilège de décider sans tenir compte de ce peuple qui avait tant souffert et Khaled Nezzar , véritable acteur d'une étape démocratique ratée, en fait partie. Au vu de ce qui se trame, l'Algérien lambda ne peut qu'admettre la mise en place, par les responsables "politiques", d'un dispositif de " terreur larvée " s'appuyant plus encore qu'auparavant sur la manipulation de la violence et la désinformation. <br /> Aujourd'hui , la loi sur "le silence des militaires" adoptée au niveau de l'APN , sans les voix des députées de l'opposition, révèle toute cette volonté d'éteindre toutes les volontés d'expression et de témoignage. Khaled Nezzar, ce personnage énigmatique et paradoxal dont les actes furent les bases d'une telle situation de blocage ou de statu-quo , tente, par des positions équilibriste, de redorer le blason du sauveur de cette Algérie. Hocine AIT AHMED lors de son témoignage , à Paris en Juillet 2002, disait: <br /> -Je me demande si on est dans le même univers ! Cela fait quarante ans qu’on produit des mutants, qui mentent, qui ont le culot de vous parler en face et de vous embrasser et qui vous préparent une embuscade. Vous savez, l’Histoire nous a rendus familiers de cette capacité de dissimulation. <br /> Une déclaration pleine de sens résumant toute la caractéristique de ce POUVOIR.
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A
Merci, Mr Mellah, pour ce commentaire sensé. En effet, malgré les faux apparences d'un pouvoir civil, tout le monde sait que l'emprise de l'armée est quasi totale. Car, si l'Algérie avait laissé une place aux politiques, il n'y aurait pas l'exclusion systématique des hommes comme Ait Ahmed, Boudiaf, etc

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  • Il est du devoir de chaque citoyen de s’intéresser à ce qui se passe dans son pays. C'est ce que je fais modestement.
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